Mali : « Je n’ai rien à voir avec le coup d’État contre IBK » (Boubèye Maïga)

L’ancien Premier ministre malien, dont la démission avait été exigée puis obtenue par ses adversaires, nie tout lien avec le coup d’État contre le président Keïta et met en garde contre la marginalisation de l’armée dans la gestion de la transition politique qui s’ouvre au Mali.Observant un silence presque absolu depuis qu’il a été forcé de quitter la primature en avril 2019, Soumeylou Boubèye Maïga (SBM) s’active beaucoup depuis le coup d’État militaire qui a renversé le 18 août dernier le président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), suite à une forte mobilisation populaire menée par une puissante coalition de partis politiques, d’activistes civils et de religieux influents. Ceux-là mêmes qui avaient obtenu sa propre tête en forçant IBK à le remplacer à la tête du gouvernement voici seulement quinze mois.

Le « tigre », comme le surnomment ses compatriotes, en raison de son impressionnante faculté à rebondir à chaque fois qu’il quitte, de gré ou de force, un de ces innombrables postes qu’il a occupés ces trente dernières années au cœur de l’État, reçoit et se déplace beaucoup. Y compris chez ses anciens adversaires comme l’Imam Mahmoud Dicko, le parrain des manifestants à l’origine de son éviction de la primature en avril 2019.

« J’ai reçu beaucoup de monde et j’ai visité certaines personnes, comme l’imam Mahmoud Dicko. Je le connais depuis la conférence nationale souveraine organisée en 1991 qui a jeté les bases du multipartisme et de la démocratie au Mali. Nous avons d’ailleurs travaillé ensemble sur la mise en place du Haut Conseil Islamique du Mali entre 1998 et 2000 dont il a été longtemps président. Nous avons toujours entretenu des relations de courtoisie et de considération. Nos désaccords fréquents, qui sont d’ailleurs assumés, ne nous empêchent pas d’avoir des rapports corrects, comme en toute démocratie. Parmi les gens avec lesquels j’ai discuté, il y a aussi des dirigeants de l’ancienne majorité présidentielle et de l’opposition. Les seuls avec qui je n’ai pas encore eu de contact sont les officiers militaires qui ont pris le pouvoir », confie cet homme auquel une rumeur tenace prête pourtant un rôle d’inspirateur, de parrain et d’éminence grise des putschistes.

« J’ai passé presque toute ma carrière au sein de l’État à travailler avec les militaires. Je connais la plupart de ces officiers aujourd’hui au pouvoir pour les avoir commandé soit directement soit indirectement. Mais cela ne fait pas de moi le commanditaire de leur coup. Je ne suis pas du genre à inspirer des coups d’État. Je n’ai aucun contact avec eux. Jusqu’à ce jour, je n’ai discuté avec aucun d’entre eux depuis le coup d’État. Il faut leur laisser la paternité de leur acte que je considère comme un acte patriotique », insiste l’ancien chef de gouvernement à la voix éternellement posée, aux mots toujours choisis et réputé sourire même quand il est profondément en colère.

Boubèye, qui se garde de tirer sur son ancien ami et compagnon du pouvoir, dit comprendre les raisons qui ont provoqué sa chute. « La situation était devenue intenable. Le pays était dans l’impasse. Le camp présidentiel et celui des manifestants se radicalisaient dangereusement. Le président IBK a tenté de faire des concessions. Mais elles ont souvent été insuffisantes ou tardives comme l’idée de démission de la trentaine de députés dont l’élection controversée est à l’origine des manifestations contre le président. Il fallait donc qu’un arbitre intervienne. C’est ce que l’armée a fait », analyse-t-il.

Boubèye, qui a été l’un des premiers hommes politiques à faire des propositions pour un retour à l’ordre constitutionnel, veut maintenant que « tout le monde accompagne les militaires pour organiser une transition consensuelle dans des délais raisonnables ».

Même s’il dit comprendre la suspension du Mali par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), qui a aussi fermé ses frontières avec le pays, l’ancien Premier ministre souhaite que l’organisation régionale parvienne rapidement à un compromis avec les putschistes pour la levée des sanctions.

« La Cedeao et les autres partenaires du pays doivent se montrer un peu plus ouverts et flexibles. Les militaires aussi. À la logique de punitions et de sanctions, je préfère une logique d’accompagnement et de soutien vers une transition apaisée », plaide-t-il.

Cet homme, qui depuis trente ans est au cœur ou autour du pouvoir au Mali, a-t-il une idée de l’architecture et des délais de la future période de transition censée ramener le pays vers un ordre constitutionnel ?

« Il y a des choses sur lesquelles, je pense que tout le monde est déjà d’accord ou presque. Le chef de l’État, qui doit assurer la transition, doit être un civil. Le Premier ministre aussi. Ce qui semble encore préoccuper est la place des militaires dans la transition. Personnellement, je pense qu’un vice-président militaire n’est pas une mauvaise idée. Les militaires pourraient aussi siéger au sein d’une sorte de Conseil national de transition chargé de jouer le rôle d’organe de législation à la place de l’Assemblée nationale dissoute par le président IBK lors de son discours de démission après l’intervention de l’armée. Il ne faut pas marginaliser les militaires », suggère cet ancien journaliste formé à Dakar et Paris, passé par le syndicalisme, puis la lutte pour la démocratie avant d’occuper plusieurs postes à responsabilité sous les différents présidents qui ont régné sur le Mali depuis la chute de l’ancien régime du parti unique du général Moussa Traoré au pouvoir de 1968 à 1991.

Selon certaines sources, Boubèye dont le goût pour le pouvoir est notoirement connu des Maliens, nourrit déjà l’objectif d’occuper le poste de chef de l’État ou de chef de gouvernement de la transition que les militaires se préparent à installer.

« A chaque jour suffit sa peine. Nous ne sommes pas encore à ce stade. La question ne se pose donc pas pour le moment. Mais je suis toujours disposé à servir mon pays, quelque que soit le contexte », dit-il.

Mali : dialogue national sur la transition politique

Sous la houlette de la junte militaire au pouvoir, les forces vives du Mali entament ce week-end des concertations pour dessiner les contours de la transition politique.Près de trois semaines après le renversement d’Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), les putschistes s’entretiennent samedi 5 et dimanche 6 septembre avec les partis politiques, les organisations de la société civile, d’anciens groupes rebelles, les syndicats et la presse. 

Le Comité National pour le Salut du Peuple (CNSP), mis sur pied par les militaires, promet de rendre le pouvoir aux civils au terme d’une transition dont la durée demeure une pierre d’achoppement.

La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), impliquée dans le processus de résolution de la crise sociopolitique, opte pour une période transitoire qui ne dépasse pas un an. 

Pour jeter les bases d’un nouveau Mali, le colonel Assimi Goïta, président du CNSP, dirige les discussions à Bamako, la capitale. Au même moment, les gouverneurs animent les échanges dans les différentes régions du pays. Objectif, répertorier les maux du Mali pour trouver ensemble les remèdes. 

« La concertation nationale se poursuivra du 10 au 12 septembre 2020 à Bamako avec la participation des délégués régionaux et ceux de la diaspora », a notamment renseigné Ismaël Wagué, le porte-parole du CNSP.

Le président déchu, Ibrahim Boubacar Keïta, a récemment été libéré par les militaires. L’ancien chef de l’État serait en résidence surveillée dans la capitale. IBK devrait se rendre bientôt à l’étranger pour y subir des soins de santé d’autant plus qu’il a été victime, cette semaine, d’un court Accident Vasculaire Cérébral (AVC). La junte militaire ne s’oppose pas à sa sortie du territoire malien.

Mali: « Les religieux sont devenus incontournables » (analyste)

Le jeune chercheur malien, Baba Dakono, Secrétaire exécutif de l’Observatoire Citoyen sur la Gouvernance et la Sécurité analyse pour Apa News la situation au Mali, deux semaines après la chute du président Ibrahim Boubacar Keita.Pres de deux semaines après avoir pris le pouvoir, les colonels du Comité National pour le Salut du Peuple (CNSP) n’ont toujours pas désigné les organes censés diriger la transition vers un retour à un ordre constitutionnel normal au Mali. Pourquoi?

Plusieurs raisons pourraient expliquer cette situation. D’abord, il convient de rappeler que les évènements du 18 août qui ont abouti plus tard à la démission du président Ibrahim Boubacar Keita ainsi que celle du gouvernement et la dissolution de l’Assemblée nationale ont créé une situation particulière et non prévue par la constitution du pays. Ces événements sont également intervenus dans un contexte de tensions sociopolitiques qui perduraient depuis des mois dans un environnement malien caractérisé par de multiples fractures et une méfiance entre les divers acteurs (État, politiques et citoyens). Dans un tel contexte, à moins d’assumer un coup de force et d’imposer un pouvoir militaire, il fallait s’attendre à des tiraillements dans la gestion du lendemain de cette rupture dans l’ordre constitutionnel. Ensuite, il y a les pressions de la communauté internationale, au premier plan la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) qui joue un rôle important dans la gestion de la crise malienne et qui ne partage pas la position des militaires sur la gestion de la transition. Enfin, la question de l’inclusivisité de la gestion de la transition divisent les acteurs. D’une part, les responsables du Mouvement du 5 juin-Rassemblement des Forces Patriotiques (M5 RFP), principal mouvement de contestation rassemblant des politiques, des religieux, des syndicats, estiment avoir plus de légitimité dans le cadre de la transition. Cette position conduit à un certain tiraillement entre ceux qui se considèrent comme forces du changement, ceux qui sont restés indifférents à la contestation et ceux qui étaient avec le président Ibrahim Boubacar Keita dit IBK avant les événements du 18 août. Les militaires sont ainsi pris dans cet étau de positionnement sans pouvoir trancher. D’autre part, la  question même du rôle que devrait jouer les militaires dans la transition divise les Maliens. Pour une bonne partie de l’opinion, il faut un militaire à la tête de la transition alors qu’une autre partie estime que cette place doit échoir à un civil. Ces quelques éléments, sans être exhaustifs, pourraient expliquer le statu quo sur cette question. 

La situation dans laquelle se trouve le Mali peut-elle affecter la lutte contre les groupes jihadistes actifs dans le nord et le centre pays? Peut-elle avoir un effet sur la présence militaire étrangère, notamment française au Mali?

Pour le moment, cette question semble être d’ailleurs la mieux gérée. Premièrement, à la différence de 2012, quand l’éclatement d’une énième rébellion touareg avait provoqué le coup d’Etat du capitaine Amadou Sanogo, cette fois-ci, il n’y a pas eu de rupture dans la chaîne de commandement au plan interne. Même si des responsables militaires ont été arrêtés, le dispositif de commandement n’a pas été, jusque-là, touché. Les opérations sur le terrain continuent y compris celles qui se poursuivent conjointement dans le cadre de la coopération régionale et internationale. Deuxièmement, les déclarations officielles françaises laissent comprendre qu’il n’y a eu pas de rupture dans la coopération militaire à ce niveau également. D’ailleurs, les autorités françaises ont annoncé dans les jours qui ont suivi les événements du 18 août des succès dans certaines opérations militaires menées au Mali, notamment la « neutralisation » d’un important chef terroriste. A ce stade, le seul élément d’inquiétude pourrait porter sur le rôle des Américains qui apportent un soutien logistique important à l’opération miliaire française Barkhane. 

Les religieux ont été très actifs dans la contestation populaire qui a débouché sur la chute du président Ibrahim Boubacar Keita. Est-ce à dire qu’il sont désormais décidés à investir le champ politique?

Dans tous les cas, ils sont devenus des acteurs incontournables de la vie publique malienne. S’agissant de l’environnement politique, il est caractérisé par une méfiance des citoyens à l’égard des acteurs qui l’animent. Si cette rupture de confiance n’est pas réglée, il sera difficile qu’un acteur puisse échapper au discrédit qui frappe la classe politique et ce, quelles que soient l’histoire et la trajectoire des acteurs. L’investissement de la scène politique par de nouveaux acteurs pourrait être une bonne ou mauvaise perspective suivant le rétablissement ou pas de la confiance des citoyens en la chose politique.

Mali: qui est l’Imam Dicko, «l’homme le plus influent du pays» ?

Dix jours après la chute d’Ibrahim Boubacar Keïta, Apa News a rencontré, à Bamako, le célèbre Imam Dicko dont le rôle a été déterminant dans la mobilisation populaire qui a provoqué le coup d’État militaire contre le président déchu.Les orateurs qui l’ont précédé ont tous pu parler sans vraiment être interrompus, sauf parfois par quelques applaudissements. Mais quand Mahmoud Dicko se lève pour se diriger vers le pupitre d’où il doit prononcer son discours, il lui faut du temps pour que le public le laisse parler. « Allahou Akbar, Allahou Akbar, Dicko, Dicko » s’époumonent longuement les milliers d’auditeurs. « Sabali, Sabali » (pardon, pardon, en bambara, la langue la plus parlée au Mali), prie-t-il plusieurs fois. Un exercice qu’il est d’ailleurs contraint de répéter tout au long de cette première intervention publique qu’il tient depuis la chute du président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), le 18 août dernier, suite à un coup d’État militaire.

C’était vendredi 28 août, en milieu d’après-midi, lors d’un meeting dans la grande salle du palais de la Culture de Bamako organisé par ses partisans, fers de lance du M5-RFP (Mouvement du 5 juin-Rassemblement des Forces Patriotiques). Cette coalition de partis politiques, d’activistes civils et de religieux qui, début juin, avait lancé le mouvement de protestation massif réclamant le départ d’IBK, finalement « démissionné » par l’armée.

À 66 ans, le religieux « le plus célèbre du Mali » ne se réjouit pas particulièrement de ce qui est arrivé à son « ami et frère », comme il continue à désigner le président déchu. Il ne regrette pas non plus le coup d’État qui l’a déposé, le quatrième de l’histoire moderne de cette ancienne colonie française d’Afrique de l’Ouest indépendante depuis 1960.

L’Imam, qui avait pourtant fortement aidé IBK à arriver au pouvoir pour la première fois en 2013, avant de s’en éloigner, estime que « vu son bilan et la situation du pays, l’intervention des jeunes officiers pour obliger IBK à quitter le pouvoir est un acte salutaire. Autrement, le pays allait droit dans le mur », explique-t-il, plus tard dans la soirée, installé dans sa modeste maison attenante à la mosquée où il officie depuis plusieurs dizaines d’années dans le quartier de Badalabougou, à deux pas du palais de la Culture.

« Je l’ai absolument soutenu lors de sa première élection en 2013. À l’époque, j’étais convaincu que c’était l’homme qu’il fallait au Mali pour ramener la paix et mettre le pays sur les rails », explique l’imam en allusion au contexte où se trouvait son pays à la veille de la première élection d’Ibrahim Boubacar Keïta comme président de la République. C’était en septembre 2013. À l’époque, le Mali venait de vivre un des moments les plus critiques de son histoire moderne, suite à une énième rébellion nationaliste touarègue survenue en janvier 2012 dans le nord du pays. Celle-ci a finalement été rapidement supplantée par des groupes jihadistes liés à Al-Qaida. Durant une dizaine de mois, ces derniers avaient érigé un mini État islamique dans cette partie du Mali grande comme deux fois la France où l’unique loi était la charia (loi islamique), coupant les mains des voleurs, lapidant les couples accusés d’adultère, etc.

Une intervention des militaires français, appuyée par quelques pays africains, a permis de chasser, à partir de janvier 2013, les islamistes des villes qu’ils occupaient jusqu’alors. Mais le septentrion malien reste à ce jour loin d’avoir été pacifié. Les agents des services publics, les représentants de l’administration et les forces de sécurité, censés signifier le retour de l’État dans la région, n’y sont toujours pas déployés, sauf dans des cas très rares et la violence s’est d’ailleurs étendue à d’autres régions du pays.

« IBK a été élu sur des promesses claires, comme la lutte contre la pauvreté, le retour de la paix, la sécurité et la réconciliation nationale. Aucune de ces promesses n’a aujourd’hui été tenue. Les Maliens souffrent toujours de la pauvreté, de la corruption, de la gabegie et les détournements des biens publics ont atteint des niveaux jamais vus. Le pays n’a pas été réunifié, la paix n’est jamais revenue et l’insécurité s’est d’ailleurs étendue à une grande partie du pays où les communautés s’entretuent », accuse-t-il.

Le religieux, qui s’est toujours distingué parmi les élites maliennes défendant l’idée de négociations avec les islamistes armés, est-il encore disposé à intercéder entre les nouvelles autorités de Bamako et les rebelles islamistes ?

Mahmoud Dicko connaît très bien les leaders maliens du principal groupe d’insurgés islamistes actif au Mali : le Groupe pour le soutien de l’Islam et des Musulmans ((GSIM, connu aussi par son acronyme en langue arabe JNIM), allié à Al-Qaida, le Touareg Iyad Ag Ghali et le Peul Amadou Koufa dont les hommes sont très actifs respectivement dans le nord et le centre du pays.

« Ils sont Maliens non ? Ce sont des fils de ce pays et on doit bien évidemment leur tendre la main. La violence n’a jamais rien réglé. Je ne cache pas que je suis bien partisan d’une discussion avec eux. Si on me le demande, je suis prêt à aller les voir. La paix dans mon pays vaut bien tous les efforts que je peux faire », justifie le religieux.

La junte désormais au pouvoir doit entamer incessamment des concertations avec les « forces vives de la nation » pour déterminer les modalités d’un rétablissement de l’ordre constitutionnel, après la démission forcée du président IBK et la dissolution de l’Assemblée nationale. L’Imam est-il intéressé par une participation au gouvernement de transition qui sera bientôt mis en place ?

« Je ne serai jamais candidat à aucun poste politique. Même si on m’oblige, je ne serai jamais président du Mali. Je suis Imam et je reste Imam », jure t-il, précisant que « cela ne veut pas dire que je ne vais pas intervenir dans le débat public quand cela se justifie ».

Mahmoud Dicko, qui aime répéter qu’un « Imam est aussi un citoyen ayant forcément un avis comme tout Malien », partage-t-il le point de vue de la nouvelle junte qui souhaite engager une transition politique de trois ans ? Un délai jugé trop long par une bonne partie des Maliens et surtout par la Cedeao (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest), à laquelle le Mali est affilié. Mandatée par la communauté internationale pour négocier avec les militaires un agenda destiné à conduire le pays vers des élections législatives et présidentielle dans un « délai raisonnable », l’organisation régionale, qui a décidé de sanctionner les nouvelles autorités en fermant toutes les frontières avec le Mali, plaide pour une transition qui ne dépasse pas un an.

« Trois ans, c’est trop long. Un an, c’est trop court. Quand on analyse objectivement la situation dans laquelle se trouve le Mali, je crois que l’idéal serait une transition de 18 mois. C’est assez suffisant pour faire l’état des lieux du pays et choisir la voie consensuelle dans laquelle le Mali doit s’engager. C’est juste une question de raison », plaide t-il.

Préfère t-il un président de transition civil ou militaire ? « Si cela dépend de moi, une personnalité civile intègre et respectée est le meilleur choix. Mais les militaires ont tout de même le droit de participer au gouvernement de transition. Ils ont joué un rôle important en parachevant cette révolution populaire que nous avons lancée en juin. Ils ont donc le droit de participer à la gestion de la période de transition, surtout qu’ils sont aussi Maliens comme nous autres civils », explique t-il.

Mahmoud Dicko que ses détracteurs accusent de travailler pour l’avènement d’une « république islamique au Mali », souhaite t-il que la nouvelle transition débouche sur des réformes qui accordent plus de place à l’Islam dans la Constitution et les lois du pays ?

« Très honnêtement, j’estime que la question ne se pose pas aujourd’hui au Mali. Même si nous sommes à 99% musulmans, ce n’est pas une priorité pour les Maliens d’évoquer la laïcité ou la question religieuse. J’estime que tout le monde a sa place dans ce pays. Personnellement, j’ai les meilleures relations possibles avec toutes les obédiences religieuses, et je l’ai même répété plusieurs fois aujourd’hui devant le public », dit-il en allusion aux hommages appuyés qu’il a rendus quelques heures plus tôt devant ses partisans aux autres chefs religieux musulmans et à l’archevêque de Bamako. « C’est mon frère et il le sait très bien. Ce n’est pas de la langue de bois », insiste-t-il.

« L’urgence pour le Mali est de retrouver un pays normal, avec un président et un gouvernement intègres, honnêtes et qui travaillent pour l’intérêt national et surtout le retour de la paix et la réconciliation nationale. Le reste est secondaire », défend celui qui aujourd’hui invite « la jeunesse malienne à rester vigilante » et promet que « plus personne n’aura jamais un chèque en blanc pour diriger le Mali ».

S’adresse t-il au futur président élu ou à la junte actuellement au pouvoir aussi ?

« Je m’adresse aux deux et je mets d’ailleurs en garde les jeunes officiers au pouvoir actuellement contre la tentation d’une gestion solitaire des affaires », assume l’Imam qui s’est rendu initialement célèbre au Mali en défiant un autre pouvoir : celui du président Amadou Toumani Touré (ATT), élu en 2002 mais renversé en 2012 par de jeunes militaires. C’était en 2007 lorsque le religieux avait mobilisé des milliers de Maliens dans le grand stade de Bamako obligeant ATT à retirer un projet du Code de la famille censé alors accorder plus de droits aux femmes.

L’Imam, qui a dirigé le Haut Conseil islamique du Mali (HCIM) de janvier 2008 à avril 2019, est aujourd’hui considéré comme le « religieux le plus populaire et l’homme public malien le plus influent ». Actuellement à la tête d’une Coordination des mouvements, associations et sympathisants de l’Imam Mahmoud Dicko (Cmas), un groupe à mi-chemin entre l’action religieuse et la politique, l’Imam est de l’avis de tous l’un des rares hommes publics maliens dont l’avis est incontournable dans bien des domaines.

Ce natif de Tombouctou en 1954, issu d’une famille de lettrés musulmans, est le fils d’un érudit peul et d’une femme arabe appartenant à la très réputée tribu des Kountas considérés comme les dépositaires de la voie soufie de la Kadririya dans le Grand Sahara et l’Afrique de l’Ouest.

Après un apprentissage initial du Coran et de la langue auprès de sa famille et de grands maîtres de sa région natale au Mali, il se rend en Mauritanie alors qu’il a à peine seize ans. Installé à Boutilimit, petite cité en plein désert située à 150 kilomètres à l’est de Nouakchott, la capitale, il s’y inscrit à l’Institut des études islamiques, le premier établissement du genre fondé en Afrique de l’Ouest qui dispose alors d’un double programme scolaire moderne et religieux. Cet établissement, dont la réputation à l’époque dépasse déjà largement la sous-région, accueillait des étudiants venant du monde entier, y compris des Occidentaux.

L’un d’entre-eux, un Français plus ou moins connu alors dans le monde du cinéma pour ses choix « bruts et sauvages » devient son ami : Serge Bard, rebaptisé Abdullah Siradj après sa conversion à l’Islam à la fin des années 1960 lors d’un voyage en Algérie. Fondateur du collectif « Zanzibar », Bard a déjà trois films à son actif : Ici et maintenant, en mars et avril 1968, Détruisez-vous (Le Fusil silencieux) et Fun and Games for Everyone, film dont Henri Alekan signe la photographie.

« J’étais très jeune. À l’époque, il n’y avait ni routes, ni transports, ni papiers d’identité. J’ai traversé toute la Mauritanie à l’ancienne. À la nomade. À dos de chameaux. J’ai été à Oualata, Nema, Timbedra, Aioun, Kiffa, et enfin Boutilimit. C’était magnifique. J’ai beaucoup appris là-bas. J’y ai rencontré de vrais maîtres mais aussi d’excellents élèves et étudiants dont je garde le meilleur des souvenirs comme mon ami français Abdulah Siradj ».

Après son séjour en Mauritanie, Mahmoud Dicko se rend en Arabie saoudite, où il s’inscrit à la célèbre université de Médine, considérée comme le grand centre de diffusion de l’Islam wahhabite. La doctrine officielle du royaume des Saoud. S’est-il converti à ce courant lors de ce séjour ?

L’Imam Dicko, qui par le passé s’était déclaré publiquement « wahhabite », ne le dit plus. Ses amis qui aiment rappeler son opposition « radicale à toute violence » préfèrent le décrire comme « un simple musulman » ou un « islamiste centriste ( c’est-à-dire modéré) sinon « un salafiste quiétiste comme tant d’autres de même obédience ».

Mali : les forces vives de la nation conviées une rencontre sur l’organisation de la transition

Le Comité National pour le Salut du Peuple (CNSP), dans un communiqué parvenu ce vendredi soir à APA, dit convier, ce samedi 29 août, les forces vives du Mali à une rencontre d’échanges sur l’organisation de la transition.Cette réunion qui se tient au Centre international de conférence de Bamako (CICB) devrait réunir le Conseil national de la Société civile, le Forum des organisations de la Société civile, les Mouvements signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger, le Groupement des partis politiques de la majorité, le Groupement des partis politiques de l’Opposition politique, le Groupement des partis politiques du Centre et les partis politiques non alignés.

Mali : la Cedeao tranche pour une transition civile

Les chefs d’État de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) proposent une personnalité civile pour mener le processus de transition politique au Mali.Quatre jours après la publication, dans le Journal Officiel du Mali, de l’Acte fondamental du Comité National pour le Salut du Peuple (CNSP), la Cedeao monte au créneau.

Au cours d’un sommet virtuel, tenu ce vendredi, les présidents ouest-africains demandent « aux responsables du CNSP d’engager immédiatement une transition civile en consultation avec la Cour constitutionnelle, les partis politiques, les organisations de la société civile et tous les autres acteurs ».

Selon la Conférence des chefs d’État de l’organisation régionale, la personnalité civile désignée comme président de la transition doit être « reconnue pour ses qualités professionnelles (mais aussi) sa probité intellectuelle et morale ». Ces mêmes critères devront prévaloir dans le choix du Premier ministre. Un poste également réservé à un civil.

Pour parer à toute éventualité, la Cedeao interdit au président de la transition ainsi qu’au Premier ministre de se présenter à la prochaine élection présidentielle. En outre, martèle cet espace communautaire, « aucune structure militaire ne devrait être au-dessus du président de la transition ».

Mahamadou Issoufou, le chef de l’État du Niger, par ailleurs président en exercice de la Cedeao, et ses pairs ont insisté sur « la mise en place rapide d’un gouvernement pour faire face aux différents défis du Mali ». Dans un futur proche, il s’agit principalement de « préparer les élections législatives et présidentielle dans un délai de 12 mois ».

D’une seule voix, les présidents ouest-africains appellent à la « finalisation urgente d’un accord sur la transition politique entre la Cedeao et le Mali », non sans inviter l’Union Africaine (UA)et l’Organisation des nations unies (Onu) à endosser cet accord.

Pour le suivi dudit accord, les chefs d’État décident « de la mise en place d’un Comité comprenant le médiateur, le président du Conseil des ministres et le président de la Commission de la Cedeao, et incluant les représentants de l’UA et de l’Onu à Bamako ».

En signe de désapprobation du renversement d’Ibrahim Boubacar Keïta, le 18 août dernier, la Cedeao a infligé au Mali une série de sanctions. Durant les travaux du sommet extraordinaire, il a été convenu de lever progressivement certaines mesures « en fonction de la mise en œuvre » des recommandations énoncées.

À l’entame de la réunion virtuelle, sur la base d’un rapport circonstancié de Goodluck Jonathan, ancien président du Nigeria et médiateur en chef de la Cedeao, l’organisation régionale a pris acte « de la démission du président Ibrahim Boubacar Keïta et de sa libération ainsi que celle des autres officiels détenus ».

La Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest tiendra, le 7 septembre prochain à Niamey (Niger), son 57e sommet ordinaire. À cette occasion, les pays membres feront le point sur l’évolution de la situation au Mali.

Mali : les coups d’État faussent le jeu démocratique

Depuis son accession à la souveraineté internationale en 1960, quatre coups d’État ont jalonné l’histoire politique du Mali où l’expérience démocratique peine à s’ancrer.La trajectoire du Mali post-indépendant est comparable au mythe de Sisyphe. Ce personnage de la mythologie grecque condamné pour l’éternité à faire rouler un rocher jusqu’au sommet d’une colline. Car Modibo Keïta, le premier président, est renversé par un coup d’État militaire dès 1968.

Dans la nuit du 18 au 19 novembre 1968, un groupe de quatorze officiers de l’armée, dirigé par le lieutenant Moussa Traoré, prend le contrôle du pays et sonne « l’heure de la liberté ».

Après ce putsch, Moussa Traoré se maintient au pouvoir jusqu’au 26 mars 1991. Ce jour-là, le lieutenant-colonel Amadou Toumani Touré (ATT) commande l’opération d’arrestation du président malien impuissant devant des manifestations massives réclamant le multipartisme. Une exigence alors en vogue sur le continent.

Aussitôt après la chute de Moussa Traoré, Soumana Sacko est porté à la tête d’un gouvernement de transition. Ce civil sera, à son tour, la cible d’une tentative de coup d’État le 15 juillet 1991. Quelques mois plus tard, des élections législatives sont organisées. L’Alliance pour la démocratie du Mali (Adéma) remporte 76 des 116 sièges mis en jeu. Le 26 avril 1992, Alpha Oumar Konaré, candidat de l’Adéma, bat au second tour de la présidentielle Tieoule Mamadou Konaté de l’Union soudanaise-Rassemblement Démocratique Africain (US-RDA).

En 1997, Alpha Oumar Konaré est réélu pour un second mandat de cinq années. Amadou Toumani Touré, redevenu un civil après une retraite anticipée, se présente comme candidat indépendant au scrutin de 2002. Il accède haut la main à la magistrature suprême avec 64,35 % des suffrages valablement exprimés contre 35,65 % pour Soumaïla Cissé.

Les Maliens reconduisent ATT le 29 avril 2007 mais ce second mandat n’ira pas à son terme. Un nouveau coup d’État, survenu quelques mois avant la fin de son dernier quinquennat, déchoit ATT. Après une brève détention, il se rend au Sénégal pour s’y réfugier. Le capitaine Amadou Haya Sanogo, chef des putschistes, invoque la mauvaise gestion de la énième rébellion menée par des combattants touaregs dans le nord du pays. Dans la foulée, le président du Comité National pour le Redressement de la Démocratie et la Restauration de l’État (CNRDRE) suspend la Constitution de 1992.

A la faveur d’une forte pression de la communauté internationale, le président de l’Assemblée nationale, Dioncounda Traoré, devient le président par intérim du Mali. Mais l’exercice du pouvoir est un chemin de croix pour lui puisque les militaires ne se résignent pas à retourner dans les casernes. Le délitement de la République conduit à l’envahissement du palais présidentiel en mai 2012. Dioncounda Traoré est pris à partie par des manifestants en furie.

Cette succession d’évènements crée les conditions d’expansion des mouvements jihadistes qui ont supplanté les rebelles séparatistes touaregs dans le nord de cet État vaste comme deux fois la France. A Gao, Kidal ou encore Tombouctou, flotte le drapeau des islamistes et la charia (loi islamique) est rigoureusement appliquée. Il aura fallu l’opération Serval conduite par les forces armées françaises pour que les jihadistes battent en retraite.

Tant bien que mal, Dioncounda Traoré parvient à mener jusqu’au bout le processus de transition politique au terme duquel Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) est élu en 2013 président du Mali avec 77,6 % des voix contre 22,4 % pour Soumaïla Cissé.

Enfin, le 18 août dernier, IBK et son Premier ministre, Boubou Cissé sont arrêtés par des officiers partis du camp militaire de Kati, à une quinzaine de kilomètres de la capitale Bamako. Dans la soirée, le chef de l’État annonce, via la télévision publique, sa démission qui entraîne la dissolution du gouvernement et de l’Assemblée nationale.

Ibrahim Boubacar Keïta a, des mois durant, été décrié par le Mouvement du 5 Juin – Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP). Un collectif d’activistes de la société civile, d’opposants politiques et de religieux qui, depuis début juin, manifeste dans les rues de Bamako, lui reprochant son incapacité à résoudre la crise sécuritaire au nord et sa gestion clanique et affairiste de l’État et de ses finances.

Le colonel Assimi Goïta, président du Comité National pour le Salut du Peuple (CNSP), tient actuellement les rênes du Mali. La junte militaire au pouvoir a promis de restaurer l’ordre constitutionnel. Mais elle ne parvient toujours pas à dire quand ni comment.

Mali : IBK libéré par la junte militaire

L’ancien président malien, Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), a recouvré la liberté neuf jours après son arrestation.Le Comité National pour le Salut du Peuple (CNSP), créé par les putschistes, a laconiquement annoncé la nouvelle sur sa page Facebook : « l’ex-président Ibrahim Boubakar Keïta a été libéré et se trouve actuellement à sa résidence ».

Cet acte est l’une des requêtes de la mission de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) conduite par Goodluck Jonathan, l’ancien chef de l’État du Nigeria. Les émissaires de la Cedeao ont récemment séjourné à Bamako, la capitale malienne, pour notamment s’entretenir avec Assimi Goïta, le président du CNSP.

Le Colonel-major Ismaël Wagué, porte-parole du CNSP, a déclaré lundi dernier qu’ « IBK doit effectuer des contrôles médicaux » à l’étranger. Dès lors, les militaires l’autorisent à « aller se soigner et revenir quand il veut ». De toute façon, la Cedeao a garanti, au besoin, le retour au Mali du président déchu.

Mali : Ibrahim Boubacar Keita est libre, annonce la junte

L’ancien président du Mali, Ibrahim Boubacar Keita a été libéré dans la nuit de mercredi à jeudi, annonce la junte. Il a été conduit à sa résidence et surveillée par les militaires.

L’annonce de sa libération a été faite ce 27 août par le porte-parole de la junte, Djibrila Maïga. Il fait savoir que le président IBK, est chez lui et libre de ses mouvements. Des sources proches du l’ancien président ont également indiqué qu’il est à sa résidence. Sa libération intervient quelques heures après la suspension de la francophonie. L’organisation a décidé de retirer le Mali de son équipe le 26 août. Quelques jours avant la Cedeao avait déjà organisé des négociations avec les militaires pour la libération de l’ancien homme fort du Mali. L’injonction leur avait été donnée de libérer avant la prochaine réunion des chefs d’Etats prévue le 28 août.

Agé de 75 ans, Ibrahim Boubacar Keita a été arrêté le 18 août dernier par les putschistes. Il a été contraint à démissionner après sept ans à la tête du Mali.

Un Comité national pour le salut du peuple a été mis en place par les officiers pour diriger le pays en attendant la transition.

 

Mali : les coups d’État faussent le jeu démocratique

Depuis son accession à la souveraineté internationale en 1960, quatre coups d’État ont jalonné l’histoire politique du Mali où l’expérience démocratique peine à s’ancrer.La trajectoire du Mali post-indépendant est comparable au mythe de Sisyphe. Ce personnage de la mythologie grecque condamné pour l’éternité à faire rouler un rocher jusqu’au sommet d’une colline. Car Modibo Keïta, le premier président, est renversé par un coup d’État militaire dès 1968.

La destitution du père de l’indépendance s’est principalement nourrie du mal-être de la population surtout rurale. Dans le Mali des années 60, le socialisme n’apporte pas les réponses adéquates aux maux des paysans qui se radicalisent. Dans la nuit du 18 au 19 novembre 1968, un groupe de quatorze officiers de l’armée, dirigé par le lieutenant Moussa Traoré, prend le contrôle du pays et sonne « l’heure de la liberté ».

Après ce putsch, Moussa Traoré se maintient au pouvoir jusqu’au 26 mars 1991. Ce jour-là, le lieutenant-colonel Amadou Toumani Touré (ATT) commande l’opération d’arrestation du président malien impuissant devant un peuple éprouvé par la sécheresse et qui veut goûter au multipartisme en vogue sur le continent.

Aussitôt après la chute de Moussa Traoré, Soumana Sacko est porté à la tête d’un gouvernement de transition. Ce civil sera, à son tour, la cible d’une tentative de coup d’État le 15 juillet 1991. Quelques mois plus tard, des élections législatives sont organisées. L’Alliance pour la démocratie du Mali (Adéma) remporte 76 des 116 sièges mis en jeu. Le 26 avril 1992, Alpha Oumar Konaré, candidat de l’Adéma, bat au second tour de la présidentielle Tieoule Mamadou Konaté de l’Union soudanaise-Rassemblement Démocratique Africain (US-RDA).

En 1997, Alpha Oumar Konaré est réélu pour un second mandat de cinq années. Amadou Toumani Touré, redevenu un civil après une retraite anticipée, se présente comme candidat indépendant au scrutin de 2002. Il accède haut la main à la magistrature suprême avec 64,35 % des suffrages valablement exprimés contre 35,65 % pour Soumaïla Cissé.

Les Maliens reconduisent ATT le 29 avril 2007 mais ce second mandat n’ira pas à son terme. Un nouveau coup d’État oblige l’ancien militaire à se retrancher au Sénégal voisin. Le capitaine Amadou Haya Sanogo, chef des putschistes, invoque la mauvaise gestion de la rébellion des Touaregs, au nord du pays. Dans la foulée, le président du Comité National pour le Redressement de la Démocratie et la Restauration de l’État (CNRDRE) suspend la Constitution de 1992.

A la faveur de son rétablissement dû à la pression de la communauté internationale, Dioncounda Traoré, président de l’Assemblée nationale à l’époque, devient le président par intérim du Mali. Mais l’exercice du pouvoir est un chemin de croix pour lui puisque les militaires ne se résignent pas à retourner dans les casernes. Le délitement de la République conduit à l’envahissement du palais présidentiel en mai 2012. Dioncounda Traoré est pris à partie par des manifestants en furie.

Cette succession d’évènements crée les conditions d’expansion des mouvements jihadistes dans le nord de cet État vaste comme deux fois la France. A Gao, Kidal ou encore Tombouctou, flotte le drapeau des extrémistes et la charia (loi islamique) est rigoureusement appliquée. Il aura fallu l’opération Serval conduite par les forces armées françaises pour que les jihadistes battent en retraite.

Tant bien que mal, Dioncounda Traoré parvient à mener jusqu’au bout le processus de transition politique au terme duquel Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) est élu président en récoltant 77,6 % des voix contre 22,4 % pour Soumaïla Cissé.

Enfin, le 18 août dernier, IBK et son Premier ministre, Boubou Cissé sont arrêtés par des officiers partis du camp militaire de Kati, à une quinzaine de kilomètres de la capitale Bamako. Dans la soirée, le chef de l’État annonce, via la télévision publique, sa démission qui entraîne la dissolution du gouvernement et de l’Assemblée nationale.

Ibrahim Boubacar Keïta a, des mois durant, été décrié par le Mouvement du 5 Juin – Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP). Un collectif d’activistes de la société civile, d’opposants politiques et de religieux qui lui reprochait son incapacité à résoudre la crise sécuritaire au nord et sa gestion clanique des affaires. Le colonel Assimi Goïta, président du Comité National pour le Salut du Peuple (CNSP), tient actuellement les rênes du Mali. La junte militaire au pouvoir a promis de restaurer l’ordre constitutionnel. Mais une question taraude les esprits : quand ?

Mali : une transition politique aux contours flous

Cinq jours après le renversement d’Ibrahim Boubacar Keïta, la junte militaire au pouvoir n’a pas encore décliné un plan de transition pour un retour à l’ordre constitutionnel.L’annonce, par un média international, d’une transition politique sur une période de trois ans a fait grand bruit. Elle fait suite à la mission de trois jours à Bamako d’une délégation de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) conduite par l’ancien président nigérian, Goodluck Jonathan.

Ce lundi, le Colonel-major Ismaël Wagué, porte-parole du Comité National pour le Salut du Peuple (CNSP), est on ne peut plus clair à ce sujet : « Rien n’est arrêté à ce stade. Chacune des deux parties a expliqué sa perception de la transition. Mais l’architecture finale sera définie par les Maliens ».

Depuis son arrestation le 18 août dernier, l’ex-chef de l’État du Mali n’est plus libre de ses mouvements. Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) est toujours cantonné au camp militaire de Kati, le quartier général des putschistes, situé à une quinzaine de kilomètres de la capitale Bamako.

« Les émissaires de la Cedeao ont demandé à voir IBK pour s’assurer qu’il est en sécurité et en bonne santé. De façon spontanée, on a accédé à leur requête. (L’ancien président) a clairement dit avoir démissionné sans contrainte car il a compris que son départ est l’aspiration du peuple. Ce dernier a dit être soulagé et n’a aucune intention de revenir au pouvoir », rapporte M. Wagué.

Conformément aux recommandations de la communauté internationale, les militaires ont accepté d’alléger les conditions de « sécurisation » de l’ancien président pour lui permettre notamment d’aller se faire soigner.

« IBK doit effectuer des contrôles médicaux. Il peut désormais être sécurisé dans un endroit de son choix. Il peut aller se soigner et revenir quand il veut. La Cedeao a garanti son retour (au Mali) au besoin », énonce le porte-parole du CNSP.

Sans surprise, le coup d’État a fermement été condamné par la communauté internationale. A l’échelle continentale, le Mali a fait l’objet d’une batterie de sanctions visant à restaurer l’ordre constitutionnel.

« On a demandé, au regard des efforts consentis, l’étude de la levée des sanctions parce que nous ne voulons pas que le peuple souffre. La majeure partie des Maliens souffre et ça risque de s’aggraver avec les sanctions », alerte le Colonel-major Ismaël Wagué. La Conférence des chefs d’État de la Cedeao va se réunir, mercredi prochain, en visioconférence pour discuter de la situation sociopolitique au Mali.

Mali: la junte propose une transition de trois ans dirigée par un militaire

La junte qui a pris le pouvoir au Mali a proposé, dimanche, une transition de trois ans et la formation d’un gouvernement composé essentiellement de militaires, rapporte Radio France Internationale (RFI).Par ailleurs, poursuivit la même source, « les nouvelles autorités de Bamako acceptent que le président déchu Ibrahim Boubacar Kéïta (IBK) retourne chez lui ou aille se soigner à l’étranger ».

 A l’issue des discussions,  la Communauté économique des Etat de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) dont la mission est conduite par l’ex-président nigérian Goodluck Jonathan et les putschistes maliens « sont d’accord pour tourner la page IBK », ajoute RFI.

Le Mali suspend l’exportation du bétail vers les pays de la CEDEAO

Le président de la filière bétail viande du Mali, l’honorable Aboubacar Ba, a annoncé dans une décision parvenue dimanche à APA, la suspension de l’exportation du bétail malien vers les pays de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest ( CEDEAO) en réaction à l’embargo de cette institution sur le Mali.« A tous les présidents des unions régionales de la filière bétail viande du Mali, le président de la filière bétail viande, l’honorable Aboubacar Ba  vous engage à prendre toutes les dispositions pour empêcher tout chargement, tout convoyage du bétail en direction des pays de la CEDEAO», ordonne la décision. 

Poursuivant, M. Ba a indiqué que les responsables des marchés à bétail de Fassou, Kayes, Kati, Fana, Nara, Niamana, Bougouni, Niena, Koury, Zegoua, Koutiala, Boussin, Yolo, Fatinè, Niono, Ségou,  Konombougou, Kona, Fatoma, Djenné et Sofara prendront toutes les dispositions pour empêcher tous les commerçants de bétails ressortissants des pays membres de la CEDEAO de venir s’approvisionner sur leur marché. 

« Il est aussi demandé aux services techniques des ministères de l’élevage et du commerce de ne délivrer aucun certificat d’exportation de bétail jusqu’à la levée de l’embargo sur notre pays », a conclu la décision. 

Jeudi dernier, les  chefs d’État et de gouvernement de la CEDEAO réunis en sommet extraordinaire par visioconférence, ont demandé le rétablissement du président Ibrahim Boubacar Kéïta (IBK), renversé par des militaires putschistes. 

« Nous décidons de la fermeture de toutes les frontières terrestres, aériennes ainsi que l’arrêt des flux et transactions économiques, commerciales, financières entre les pays membres de la CEDEAO et le Mali, à l’exception des denrées de première nécessité, l’électricité et le carburant et demandons à tous les partenaires de faire de même», a également fait savoir à l’issue de ce conclave, Mahamadou Issoufou, le président du Niger et président en exercice de cette institution. 

Mali : Assimi Goïta, l’artisan d’une nouvelle ère

Jusque-là inconnu du grand public, le chef de la junte militaire qui vient de prendre le pouvoir au Mali espère remettre sur les rails un pays en mauvaise posture.Le colonel Assimi Goïta, à 37 ans seulement, porte sur ses épaules les espoirs d’une population meurtrie par une crise sécuritaire et sociopolitique. 

Le président du Comité National pour le Salut du Peuple (CNSP), la junte militaire qui a destitué le président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), veut être du bon côté de l’Histoire en menant le Mali vers une transition politique sans heurts.

Aux premières heures de la chute d’IBK, Assimi Goïta est apparu en retrait à la télévision publique aux côtés de quatre autres colonels : Modibo Koné, Malick Diaw, Sadio Camara et Ismaël Wagué, le porte-parole du CNSP. Le nouvel homme fort de Bamako a déclaré que les putschistes n’ont pas « le droit à l’erreur ».

Au nom du père

Assimi Goïta est le fils d’un officier de l’armée de terre malienne. Très tôt, il montre des prédispositions devant l’amener à marcher sur les traces de son père. 

Pour réaliser son rêve d’enfant, il intègre en 1992 le Prytanée militaire de Kati, à une quinzaine de kilomètres de la capitale Bamako. Après cette formation initiatique, Goïta fait cap sur l’École militaire interarmes de Koulikoro où il se spécialise dans les armes blindées et la cavalerie. 

Issu de la promotion Mamadou Coulibaly, cet enfant de troupe se distingue par sa rigueur, sa ténacité et son aptitude dans le commandement. Des points forts qui lui vaudront plusieurs opérations au nord et au centre du Mali. 

Un CV fourni 

Au début des années 2000, Assimi Goïta est affecté au 134e Escadron de reconnaissance de Gao. En 2005, il rejoint le 123e Escadron de reconnaissance de Kidal et obtient la même année le diplôme de l’École d’application du Train. 

Ses qualités de meneur d’hommes le propulsent au rang d’adjoint du chef d’escadron. Un poste qu’il occupe jusqu’en 2008. Cette année-là, Assimi Goïta décroche son diplôme du Cours de Capitaine en Allemagne. 

Ce combattant dans l’âme poursuit sa marche vers les sommets en devenant par la suite le commandant du Groupement tactique N°3. Sa mission : traquer les groupes armés terroristes et les narcotrafiquants qui dictent leur loi à la lisière de l’Algérie voisine. 

De 2011 à 2013, Goïta dirige la 2e Compagnie de soutien puis le 37e régiment de transport. Au terme de plusieurs missions à Gao, Kidal, Menaka, Tessalit ou encore Tombouctou, il décide de servir dans les Forces spéciales avec en bandoulière le brevet de l’Enseignement militaire supérieur N°1.

En 2015, il s’envole pour le Gabon où il se perfectionne à l’École d’État-major. De retour au Mali, il est nommé Officier d’État-major au Centre opérationnel interarmes de l’État-major général des Armées puis Chef de division opération de l’État-major de l’Armée de terre.

Plus tard, il participe au Cours d’opérations spéciales de lutte contre le terrorisme à Garmich (Allemagne) et à celui de Floride (États-Unis). Aguerri au combat, le colonel Goïta est promu, en novembre 2015, Coordinateur des opérations spéciales du ministère de la Défense auprès du ministère de la sécurité suite à l’attaque terroriste de l’hôtel Radisson Blu de Bamako. 

Entre 2016 et 2017, il commande l’unité opérationnelle du Bataillon autonome des Forces spéciales déployées à Sofara. Et depuis juillet 2018, il assure le commandement du Bataillon autonome des forces spéciales et des Centres d’aguerrissement. Cette unité d’élite collabore souvent avec les forces américaines, notamment dans le cadre des exercices Flintlock.

Marié et père de trois enfants, Assimi Goïta a maintes fois été décoré : croix de la valeur militaire, médaille de mérite militaire, médaille commémorative de campagne, médaille de la Défense française avec échelon Or et médaille des Nations Unies au Darfour. 

Vent favorable 

Pour l’heure, le Mouvement du 5juin – Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP), qui réclamait la chute de l’ancien chef de l’État depuis plusieurs semaines, accorde sa confiance à Goïta pour le rétablissement de l’ordre constitutionnel avec comme point d’orgue l’organisation d’élections générales. 

Le M5-RFP, composé d’opposants politiques, d’activistes de la société civile et de religieux, prévoit de fêter vendredi « la victoire du peuple malien », mais veillera sans nul doute au respect du pacte scellé avec la junte militaire. 

Mercredi dernier, le président du CNSP a rencontré de hauts fonctionnaires maliens au siège du ministère de la Défense afin de « les assurer de (son) soutien par rapport à la continuité des services de l’État ».

Il en faudra plus pour rassurer la communauté internationale qui a unanimement condamné le putsch. Selon des sources militaires, Assimi Goïta est le principal instigateur du coup d’État. Ce dernier assure n’avoir aucune ambition dans le champ politique.

Mali : les putschistes appellent à une transition du pouvoir

Les militaires qui ont pris le pouvoir au Mali et forcé le président Ibrahima Boubacar Keïta à la démission, promettent d’organiser dans un « délai raisonnable » des élections générales.Près de quatre heures après la déclaration du président déchu, des hommes en uniforme sont apparus à leur tour tard dans la nuit de mardi à mercredi à la télévision publique ORTM pour s’adresser aux Maliens et à la communauté internationale.

« Nous, forces patriotiques regroupées au sein du Comité national pour le salut du peuple (CNSP), avons décidé de prendre nos responsabilités devant le peuple et devant l’histoire d’assurer la continuité de l’État et des services publics », a déclaré le colonel-major Ismaël Wagué, présenté comme le porte-parole des militaires mutinés.

Au terme d’une folle journée du 18 août débutée par une minuterie au camp de Kati, à 15 km au nord de Bamako, des militaires ont procédé à des arrestations de plusieurs autorités dont le chef de l’Etat et des membres de son gouvernement, avant de prendre le pouvoir. Tout cela s’est passé sans effusion de sang et avec l’acclamation d’une partie du peuple, qui demandait depuis plusieurs mois le départ du président IBK.

Entouré de quatre autres frères d’armes, le colonel Wagué précise : « Nous ne tenons pas au pouvoir, mais nous tenons à la stabilité du pays, qui nous permettra d’organiser dans des délais raisonnables des élections générales pour permettre au Mali de se doter d’institutions fortes ».

Dans cette perspective, « la société civile et les mouvements socio-politiques sont invités à nous rejoindre pour ensemble créer les meilleures conditions d’une transition politique civile conduisant à des élections générales crédibles pour l’exercice démocratique à travers une feuille de route qui jettera les bases d’un Mali nouveau ».

Par ailleurs, les militaires putschistes demandent aux organisations internationales et sous-régionales de les « accompagner pour le bien-être du Mali ».

« La Minusma, la force +Barkhane+, le G5 Sahel, la force Takuba demeurent nos partenaires pour la stabilité et la restauration de la sécurité », a souligné l’officier, assurant que « tous les accords passés » seront respectés. Il affirme que les militaires sont « attachés au processus d’Alger », l’accord de paix signé en 2015 entre Bamako et les groupes armés du nord du pays, parce que « rien ne doit entraver l’unité malienne ».

Toutefois la Cedeao avait plus tôt communiqué dans la nuit pour condamner l’action des « militaires putschistes » tout comme l’Union africaine (UA), les Nations unies (ONU) ainsi que plusieurs autres organisations et grandes puissances.

D’ores et déjà, la Cedeao leur « dénie catégoriquement toute forme de légitimité (…) et exige le rétablissement immédiat de l’ordre constitutionnel », ainsi que « la libération immédiate » du président malien et « de tous les officiels arrêtés ». Elle « suspend » également le Mali de tous ses organes de décision « avec effet immédiat » et lui ferme ses frontières.

Cette dernière décision a été reprise par le CNSP à compter de ce mercredi 19 août 2020 « jusqu’à nouvel ordre. Un couvre-feu est (également) instauré de 21 heures à 5 heures du matin jusqu’à nouvel ordre ».

L’objectif affiché des militaires mutins est de remettre leur pays sur les rails de la stabilité : « Le Mali sombre de jour en jour dans le chaos, l’anarchie et l’insécurité par la faute des hommes chargés de sa destinée », déplore le colonel Wagué.

« Le Mali est un vaste pays riche de par sa diversité culturelle, riche de son sous-sol, riche de ses hommes, riche de sa faune et de sa flore, mais dont l’existence en tant que pays, nation, est menacée dans tous ses fondements ».

Le colonel-major a dénoncé le « clientélisme politique » et « la gestion familiale des affaires de l’Etat », ainsi que la « gabegie, le vol et l’arbitraire », une justice « en déphasage avec les citoyens », une « éducation nationale qui patauge » ou encore des massacres de villageois, le « terrorisme et l’extrémisme ».

Ces maux ont pour lui « fini de tuer toute opportunité de développement dans le peu qui reste encore de ce beau pays ».

Mali : le président Ibrahim Boubacar Keita a finalement démissionné

Il a annoncé sa démission le 19 août 2020 sur les ondes de l’Office de radiodiffusion télévisé du Mali (ORTM). La déclaration a été faite depuis le camp militaire dans lequel il a été conduit par l’armée après son arrestation

« Je ne souhaite qu’aucun sang ne soit versé », clame IBK devant les caméras de l’ORTM. « J’ai décidé de quitter mes fonctions et toutes mes fonctions à partir de ce moment ». Il a annoncé sa démission et la dissolution du Parlement et du gouvernement. Ibrahim Boubacar Keita était vêtu d’un boubou blanc, de son bonnet habituel et d’un masque de protection contre la Covid-19 au moment de la déclaration.

La démission du président malien fait suite aux mutineries observées dans la base militaire de Kati. Il s’est avéré que l’armée voulait prendre le pouvoir par les armes dans la journée du 18 août 2020. Les putschistes ont annoncé l’arrestation d’IBK et son premier ministre, Boubou Cissé. La nouvelle de la prise de pouvoir par le colonel Malick Diaw s’est vite répandu dans les nouveaux médias, les médias traditionnels et dans les réseaux sociaux. C’est alors que la CEDEAO a très vite condamné l’acte et demandé aux militaires de regagner les casernes.

Prenant acte de tout cela : IBK décide se retirer pour éviter un bain de sang : « Si aujourd’hui il a plu à certains éléments de nos forces armées de conclure que cela devait se terminer par leur intervention, ai-je réellement le choix ? M’y soumettre, car je ne souhaite qu’aucun sang ne soit versé pour mon maintien aux affaires », annonce le président. « C’est pourquoi je voudrais en ce moment précis, tout en remerciant le peuple malien de son accompagnement au long de ces longues années et la chaleur de son affection, vous dire ma décision de quitter mes fonctions, toutes mes fonctions, à partir de ce moment », ajoute-t-il.

Au pouvoir depuis 2013, le président malien IBK est contesté depuis 2018 par son peuple, on lui reproche d’être un président impuissant.

Crise malienne : « C’était prévisible sauf pour IBK » (analyste)

Le chercheur malien, Bréma Ely Dicko, explique pourquoi l’arrestation par l’armée du président Ibrahim Boubacar Keïta n’est pas une surprise.Qui sont les militaires ayant arrêté le président Ibrahim Boubacar Keïta et le Premier ministre Boubou Cissé ? Et quelles sont leurs motivations ?

Ce sont des officiers de l’armée, de la gendarmerie et de la garde nationale malienne qui ont effectué ce coup de force. Leur acte trouve sa première raison dans le contexte social et politique favorable avec les manifestations organisées par le Mouvement du 5 juin – Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP), un regroupement d’opposants politiques, de la société civile et de figures religieuses comme le célèbre Imam Mahmoud Dicko. Depuis le 5 juin dernier, ce mouvement organise régulièrement des manifestations de rue réclamant le départ du chef de l’Etat. L’intervention de ces militaires pour arrêter le président, son Premier ministre et plusieurs dignitaires du régime peut aussi avoir un lien avec le limogeage lundi, par le président Ibrahim Boubacar Keïta, de son deuxième aide de camp. Ce dernier est un officier habitant au camp militaire de Kati, dans la banlieue de Bamako d’où les mutins sont partis ce mardi pour arrêter le chef de l’Etat et ses collaborateurs. L’étincelle d’où tout est parti est une tentative d’arrestation dans le camp de Kati de l’aide de camp démis de ses fonctions. Mais ses proches se sont opposés. Par la suite, il y a eu des tirs de sommation et ces militaires ont saisi cette occasion pour descendre sur la capitale et en découdre avec le pouvoir.

Un tel évènement était-il prévisible ?

C’était un scénario que tout le monde craignait depuis quelques temps, sauf peut-être le président IBK et son entourage. Ils pensaient que le mouvement populaire réclamant le départ du locataire de Koulouba allait s’essouffler avec le temps ou qu’un compromis politique était encore possible, même si cela devait se faire avec quelques-uns seulement des animateurs de la contestation qui accepteraient une entrée dans un gouvernement d’union nationale.

Cet aveuglement du camp présidentiel n’avait pourtant aucune raison objective. Le climat général qui règne dans le pays devait le pousser à la prudence. L’échec de la médiation initiée par la Cedeao (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) et confiée à l’ancien président du Nigeria Goodluck Jonathan, aurait dû servir de signal. Le mécontentement maintes fois exprimé par les familles de militaires engagés sur le terrain contre les groupes jihadistes et qui subissent régulièrement des attaques meurtrières aurait dû pousser IBK et son entourage à être plus souples avec leurs adversaires et se méfier d’un éventuel coup de force d’une partie au moins de l’armée.

Quelles sont les conséquences éventuelles de cette intervention militaire sur la situation politique dans le pays ?

Aux premières heures du mouvement de ces militaires vers la capitale, leur action a été condamnée par la France, les Etats-Unis et la Cedeao. S’ils ne trouvent pas rapidement un accord avec le président IBK, on peut s’attendre à des sanctions politiques et économiques contre le Mali. Un pays pauvre, aux ressources limitées et confronté depuis bientôt dix ans à divers groupes jihadistes. L’hypothèse est à prendre très au sérieux, surtout que le Mali se trouve dans une région où plusieurs pays sont menacés par l’instabilité en raison de crises impliquant les chefs d’Etat. En Guinée et en Côte d’Ivoire voisines, la volonté des présidents actuels de briguer un troisième mandat crée une situation dangereuse. Dans ces pays, des militaires pourraient s’inspirer de leurs frères d’armes maliens et prendre le pouvoir par la force.

Les militaires maliens n’ont pas le choix. Ils doivent engager au plus vite un dialogue avec la majorité présidentielle et les dirigeants de la contestation qui souhaitaient la chute d’IBK. Le but de ce dialogue est d’aboutir à une solution de sortie de crise qui doit déboucher sur une sorte de gouvernement chargé de réformer le pays. Car le problème majeur du Mali sous règne d’IBK est avant tout un problème de gouvernance.

Mali : Ibrahim Boubacar Keïta jette l’éponge

Le président de la République du Mali a annoncé, dans la nuit du mardi au mercredi, sa démission quelques heures seulement après son arrestation par des mutins du camp militaire de Kati.Il est minuit. L’Office de Radiodiffusion Télévision du Mali (ORTM, public) interrompt abruptement ses programmes pour une édition spéciale. Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) s’adresse à ses concitoyens.

Epuisé par l’enchaînement des évènements, le président de la République s’est finalement fait une raison : « Je voudrais, tout en remerciant le peuple malien de son accompagnement durant ses longues années et de la chaleur de son affection, vous dire ma décision de quitter mes fonctions ».

Dans cette déclaration enregistrée à Kati, une localité située à quinze kilomètres de la capitale Bamako, le chef de l’Etat affirme s’être soumis à la volonté d’une frange de la population car « (il) ne souhaite qu’aucun sang ne soit versé pour (son) maintien aux affaires ».

L’ancien locataire de Koulouba, le palais présidentiel, tourne la page non sans regrets puisque pendant sept ans, il a eu « le bonheur d’essayer de redresser ce pays ». Avec lucidité, Ibrahim Boubacar Keïta reconnaît que « chaque moment (a sa propre) vérité » d’où sa décision de quitter le pouvoir.

De facto, l’Assemblée nationale et le gouvernement restreint récemment mis en place sont dissouts. « Ai-je rééllement le choix  » ? C’est la question que s’est posée IBK après l’intervention de frondeurs de l’armée qui ont indubitablement précipité sa chute et celle de son régime.

Malgré tout, il jure n’éprouver « aucune haine vis-à-vis de personne » car, dit-il, « mon amour pour mon pays ne me le permet pas ». En outre, le président malien a promis que son compagnonage « avec les forces armées ne va jamais cesser ». Concluant son propos, Ibrahim Boubacar Keïta regrette que « les semaines de turbulence » aient coûté la vie à des Maliens.

Mali : le président IBK sous le contrôle de mutins

Le président Ibrahim Boubacar Keïta et son Premier ministre, Boubou Cissé ont été arrêtés par des militaires ce mardi à Bamako avant d’être conduits au camp Soundiata Keïta de Kati.C’est un coup de théâtre au Mali. Tout porte à croire que l’on assiste à une mutinerie. Tôt ce matin, des coups de feu ont retenti au camp militaire de Kati où se trouve une garnison.

Les frondeurs, composés entre autres, d’officiers se sont ensuite dirigés vers Bamako, distante de 15 kilomètres, pour procéder à l’arrestation de hauts gradés de l’Armée nationale ainsi que des ministres.

Dans la mi-journée, de nombreux jeunes conduisant des motos ont pris d’assaut la Place de l’indépendance pour manifester leur soutien aux militaires.

Depuis quelques mois, ce lieu accueille les rassemblements du Mouvement du 5 juin-Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP) qui réclame avec insistance la démission du chef de l’Etat. Des vidéos d’une colonne de militaires applaudis par des Maliens visiblement satisfaits circulent sur les réseaux sociaux.

L’un des deux canaux de l’Office de Radiodiffusion Télévision du Mali (ORTM) a momentanément cessé d’émettre et les agents ont été priés de rentrer chez eux. La chaîne publique a récemment été la cible de manifestants agités qui ont incendié des véhicules dans la cour de l’ORTM.

Pour l’heure, les mutins n’ont pas officiellement exprimé les réelles motivations de leurs actes. Sur son compte Twitter, Moussa Faki Mahamat, le président de la Commission de l’Union Africaine (UA) a condamné « énergiquement l’arrestation du président Ibrahim Boubacar Keïta, du Premier ministre et d’autres membres du gouvernement malien et appelle à leur libération immédiate ».

Le président français Emmanuel Macron dit suivre « attentivement la situation et condamne la tentative de mutinerie en cours ».

A la tête du Mali depuis 2013, Ibrahim Boubacar Keïta a vu son crédit s’effriter au fil des mois. Malgré ses appels incessants au dialogue et la médiation entreprise par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao), ses pourfendeurs ne relâchent pas la pression.

Mali : la Cedeao appelle à la fin de la mutinerie

La Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) engagée depuis le début comme médiatrice dans la crise sociopolitique au Mali, n’est pas restée insensible à la mutinerie en cours dans ce pays.Dans un communiqué publié ce mardi après-midi sur son site internet, elle appelle les militaires mutins « à regagner sans délai leurs casernes ».

Dans un contexte sociopolitique « déjà très complexe », des tirs ont été entendus cette matinée du 18 août au camp militaire de Kati, situé à 15 km au nord de la capitale Bamako.

« Des pick-up en provenance de Bamako, lourdement armés, ont pénétré dans le camp Soundiata-Keïta et les hommes à bord ont tiré en l’air. Il y a eu riposte de militaires présents, qui ont cru à une attaque », a affirmé à Jeune Afrique un officier malien, sous couvert d’anonymat. Les échanges de tirs ont ensuite cessé.

Selon rfi.fr, l’accès du camp proche de Koulouba, le Palais présidentiel malien, est impossible puisque la route est bloquée par les militaires.

Cette fronde d’une partie de l’armée malienne serait dirigée par des officiers qui n’expliquent toujours pas les raisons de leur mécontentement et leurs intentions.

L’arrestation de plusieurs personnalités du gouvernement peine encore à être confirmée là où les autorités ne se sont pas encore officiellement exprimées. Si la piste du coup d’Etat militaire est fortement avancée, d’autres sources bottent en touche et précisent que le malaise serait lié à une histoire de primes.

Pour le moment, la situation dans la capitale est « très tendue », selon Maciré Diop, journaliste malien contacté par APA. Selon lui, aucune victime n’est déplorée pour le moment même si l’atmosphère « peut dégénérer à tout moment ».

Toutefois, la Cedeao dit suivre « avec une grande préoccupation les développements en cours au Mali » et rappelle « sa ferme opposition à tout changement politique anticonstitutionnel ».

« En tout état de cause, elle condamne vigoureusement la tentative en cours et prendra toutes les mesures et actions nécessaires à la restauration de l’ordre constitutionnel ».

La Cedeao demande également « à toutes les parties prenantes maliennes de privilégier le dialogue pour résoudre la crise que traverse le pays ».

Embourbée dans une crise sécuritaire sur fond de terrorisme, le Mali vit en même temps une tension sociopolitique depuis trois mois. Sous la conduite du Mouvement du 5 juin du célèbre imam Mahmoud Dicko et du Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP), des manifestations sont régulièrement organisées pour réclamer la démission du président Ibrahim Boubacar Keïta.

La médiation de la Cedeao avant celle de chefs d’Etat de cette région, avait abouti à la formation d’un gouvernement restreint de six ministres autour du Premier ministre Boubou Cissé. Il avait pour principale mission de négocier la formation d’un gouvernement d’union nationale.

Mali: des coups de feu entendus dans un camp militaire (médias)

Des tirs d’armes ont retenti, mardi matin, au camp militaire de Kati, situé à une quinzaine de kilomètres de Bamako, la capitale du Mali, rapportent plusieurs médias.Selon rfi.fr, l’accès du camp proche de Koulouba, le Palais présidentiel malien est impossible puisque la route est bloquée.

Ce qui a poussé certaines ambassades, comme celles de la France et de la Norvège, à conseiller à leurs ressortissants de rester chez eux « en raison d’une agitation possible dans la ville de Bamako ».

Depuis trois mois, le Mali est confronté à une grave crise sociopolitique consécutive à l’annonce des résultats des élections législatives. La Cour constitutionnelle a été accusée d’avoir aidé le parti au pouvoir à remporter des sièges au parlement.

Le Mouvement du 5 juin- Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP) exige toujours la démission du président Ibrahim Boubacar Keïta malgré la médiation de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao).

Crise malienne : l’intransigeance du M5-RFP

Des milliers de personnes ont manifesté sous la pluie mardi à la Place de l’indépendance de Bamako pour la démission du président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK).Le Mouvement du 5 juin – Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP) campe sur ses positions. Après avoir observé une trêve d’une vingtaine de jours, ce collectif hétéroclite est à nouveau en ordre de marche.

La mission de médiation à Bamako de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao), celle de cinq chefs d’Etat de cet espace communautaire puis le sommet extraordinaire de l’organisation régionale en visioconférence n’ont pas changé la donne.

Le M5-RFP a recémment rejeté le plan de sortie de crise proposé par la Cedeao. Cette dernière estime que la démission d’IBK est « une ligne rouge ». Dans leurs recommandations, les présidents ouest-africains ont entre autres invité tous les acteurs de la crise sociopolitique à participer à la formation d’un gouvernement d’union nationale.

Jusque-là, le M5-RFP est sourd à cet appel. Pendant ce temps, Ibrahim Boubacar Keïta a commencé à mettre en œuvre le plan de sortie de crise avec notamment l’installation hier lundi de la nouvelle Cour Constitutionnelle.

Le chef de la mission de médiation de la Cedeao, Goodluck Jonathan, a assisté à la cérémonie de prestation de serment des membres de cette haute juridiction. L’ancien président du Nigeria est revenu dans la capitale malienne pour essayer d’arracher le compris tant attendu : « Toute la communauté internationale sait qu’il y a des difficultés au Mali. Nous tentons d’aider (ce) peuple à les résoudre ».

Mali : le président IBK attend beaucoup du gouvernement

Le chef de l’État malien, Ibrahim Boubacar Keïta compte énormément sur le gouvernement dirigé par Boubou Cissé pour pacifier le pays.Le locataire du palais Koulouba a décliné ses attentes à travers une lettre de mission publiée ce vendredi. Dans cette missive, Ibrahim Boubacar Keïta déclare avoir reconduit, le 11 juin dernier, Boubou Cissé au poste de Premier ministre en raison de ses « compétences techniques avérées », de sa « loyauté » et de son « sens élevé de l’État et de l’éthique ».

Comme l’ont préconisé la Mission de médiation de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) et les cinq chefs d’État de cette organisation régionale qui se sont rendus le 23 juillet à Bamako, le président de la République est convaincu qu’« un gouvernement d’union nationale, en ce temps d’épreuves, constituerait une solide garantie ».

À l’en croire, il sera « la vitrine du Mali rassemblé, réuni et remobilisé pour le seul combat qui vaille : celui pour la sécurité et l’intégrité du territoire, celui pour le bien-être du peuple, celui enfin pour un avenir serein pour l’écrasante majorité de la population, à savoir la jeunesse, dont vous savez combien elle m’est chère ».

Le 27 juillet 2020, dans la foulée d’un sommet extraordinaire de la Cedeao tenu par visioconférence, un gouvernement restreint de six ministres a été formé. Cette équipe a une lourde tâche : construire les fondations d’un futur gouvernement d’union nationale.

À cet effet, le président IBK assigne cinq missions principales à « ce gouvernement (qui) ne connaîtra aucun répit ».

Premièrement, il doit « travailler au retour de la normalité, de la concorde et de la paix sociale et créer les conditions propices à la formation d’un gouvernement d’union nationale ». Deuxièmement, le gouvernement de Boubou Cissé doit « diligenter une enquête minutieuse et crédible sur les pertes en vies humaines ainsi que les atteintes aux biens publics et privés tant à Bamako les 10, 11 et 12 juillet que précédemment lors des manifestations qui ont eu lieu à Kayes et Sikasso notamment ».

Troisièmement, le chef de l’État malien souhaite que soit accélérée « l’opérationnalisation des mécanismes de suivi de la mise en œuvre des recommandations du Dialogue National Inclusif ». Quatrièmement, il conseille d’« étudier les voies et moyens de la mise en place d’un fonds d’indemnisation des victimes desdites manifestations ou de leurs ayant droit ».

Cinquièmement, Ibrahim Boubacar Keïta veut que ces hommes en qui il a confiance mobilisent « toutes les énergies et les ressources requises pour l’application immédiate et complète de l’article 39 (de la loi N°2018-007 du 16 janvier 2018 portant statut des enseignants), en dépit (de son) coût financier particulièrement important ».

En plus de cela, le gouvernement provisoire devra se pencher sur « (les) contingences de la saison agricole et les complexités de la pandémie du coronavirus ». Partant de là, le président du Mali exhorte ses ministres à libérer « tous les crédits nécessaires pour une bonne campagne agricole », et à maintenir voire intensifier « la lutte contre la pandémie, car notre seul salut réside dans la prévention ».

Pour accomplir cette mission ardue, IBK invite les membres du gouvernement à « rester humble, (à) garder (leurs)portes ouvertes et (leurs) mains tendues ».

Depuis le mois de juin, un vent de révolte souffle au Mali avec l’organisation de manifestations pour réclamer la démission du président de la République qui n’entend pas céder. Ce dernier explique les malheureux évènements par «

(des) incompréhensions et (des) malentendus », non sans dire à ses concitoyens : « Nous n’avons pas le choix, nous sommes appelés à rester ensemble. Notre destin est solidaire ».

Toutefois, met en garde le chef de l’État, la loi et l’ordre doivent prévaloir. Par conséquent, dit-il, il est impossible de transiger là-dessus parce que ce sont là les prescriptions et les préalables de l’État de droit que nous ambitionnons de construire.

Echanges transfrontaliers d’électricité: la Banque mondiale octroie 167,55 milliards Fcfa à six pays ouest-africains dont la Côte d’Ivoire

Le Conseil des administrateurs de la Banque mondiale a approuvé mercredi l’octroi d’une enveloppe de crédits et de dons d’un montant total de 167,55 milliards Fcfa de l’Association internationale de développement (IDA) à six pays Ouest-africains dont la Côte d’Ivoire afin de soutenir des réformes visant des échanges transfrontaliers d’électricité en Afrique de l’Ouest.Ce soutien de la Banque mondiale d’une valeur de 300 millions de dollars (167,55 milliards Fcfa) vise à aider le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée, le Libéria, le Mali et la Sierra Leone à mettre en œuvre les réformes sectorielles nécessaires pour créer avec succès un marché régional de l’électricité, indique un communiqué transmis à APA. 

Il s’agit d’un Programme de financement à l’appui des politiques de développement pour le commerce régional de l’énergie en Afrique de l’Ouest qui a pour objectif de lever les obstacles aux échanges d’électricité, avec à la clé des tarifs plus bas pour les consommateurs, une compétitivité accrue pour les entreprises et un approvisionnement plus résilient et fiable. 

Ce programme devrait permettre l’accès des populations à l’l’électricité à un coût abordable. Seulement 50 % de la population en Afrique de l’Ouest a accès à l’électricité, qui plus est à un coût parmi les plus élevés du monde, et notamment deux fois supérieur au prix observé globalement en Afrique de l’Est. 

En outre, en raison des dysfonctionnements des réseaux, les services d’électricité sont loin d’être fiables, avec des coupures qui atteignent en moyenne 44 heures par mois. Cela freine le développement dans plusieurs régions de ces pays. 

Les pays membres de la Commission économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) collaborent depuis une dizaine d’années à la mise en place d’un marché de l’électricité totalement intégré, dans le cadre du système d’échanges d’énergie électrique ouest-africain. 

Ils auront achevé, d’ici quelques années, les principales interconnexions qui permettront de relier leurs réseaux. Le programme approuvé aujourd’hui vient appuyer l’application d’un programme de réformes qui permettra aux pays concernés de mettre en œuvre des politiques qui faciliteront des échanges transfrontaliers d’électricité produite à partir de gaz naturel, d’énergie hydraulique et renouvelable, plus propre et à bas coût. 

Ces sources d’approvisionnement permettront de remplacer les petites centrales au fioul et les générateurs à diesel, plus coûteux, et d’améliorer l’efficacité des services d’électricité. 

« L’Afrique de l’Ouest possède un immense potentiel dans la production d’énergie propre et verte, dont les pays peuvent tirer parti, en s’unissant, pour fournir à leurs habitants une électricité meilleur marché et favoriser la création d’emplois », a déclaré  Ousmane Diagana, vice-président de la Banque mondiale pour l’Afrique de l’Ouest et centrale.  

Ce programme régional de réforme de l’énergie s’articule autour de trois axes. Le premier axe a pour objectif de renforcer la confiance dans la bonne application des accords commerciaux en appuyant la sécurisation des paiements des échanges d’énergie. Le deuxième axe, lui, soutient la mise en œuvre de décisions d’investissement au coût le plus bas, privilégiant des solutions régionales et promouvant la concurrence. 

Quant au troisième axe, il vise à renforcer la transparence en traitant la question de la solvabilité des compagnies d’électricité nationales et en garantissant l’information du marché sur les grandes décisions d’investissement qui ont une incidence sur l’offre et la demande. 

« Ce programme jouera un rôle fondamental pour la réalisation de notre objectif de marché régional de l’énergie, et je tiens à remercier la Banque mondiale pour son soutien, a affirmé Jean-Claude Kassi Brou, président de la Commission de la CEDEAO. 

Le système d’échanges d’énergie électrique ouest-africain devrait continuer à progresser et s’attacher, grâce à ce soutien, et aider ses pays membres à collaborer et coordonner les réformes nécessaires pour développer le commerce régional de l’électricité et avoir ainsi accès à un approvisionnement plus abordable et plus fiable.

 L’optimisation des ressources énergétiques de la région permettra de mettre en place des systèmes électriques efficaces et résilients qui permettront à leur tour de rendre nos économies plus productives et inclusives. La CEDEAO continuera à être un partenaire solide en vue de la réalisation de cet objectif».

Par ailleurs,  ce Programme de financement à l’appui des politiques de développement pour le commerce régional de l’énergie en Afrique de l’Ouest est le premier financement de ce type à recourir au guichet régional de l’IDA. 

Ce dispositif permet à la Banque mondiale de soutenir des réformes qui visent à atteindre un objectif commun à plusieurs pays de manière coordonnée. Il s’inscrit dans la directive de la CEDEAO sur la sécurisation des échanges transfrontaliers d’énergie électrique, adoptée en décembre 2018 dans le but de créer un marché régional de l’électricité. 

Les retombées économiques de ce marché sont évaluées à 665 millions de dollars par an pour l’ensemble des pays concernés, avec une réduction d’un tiers du coût moyen de la production d’électricité dans la région, conclut le communiqué.  

Crise malienne : retour à la case départ

Le Mouvement du 5 juin-Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP) rejette ce mardi le plan de sortie de crise proposé la veille par la Cedeao.L’impasse politique persiste au Mali. Pour l’opposition qui conteste le président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), l’application des six mesures issues du sommet extraordinaire de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) ne permettra pas de sortir de la crise politique dans laquelle le pays est entré ces derniers mois. 

Celles-ci se résument à la démission des 31 députés dont l’élection est contestée, à la recomposition de la Cour constitutionnelle, à la participation à un gouvernement d’union nationale de l’opposition, en particulier le M5-RFP (collectif d’opposants, de religieux et d’activistes de la société civile qui réclament le départ du chef de l’État), à la mise sur pied d’une Commission d’enquête pour situer les responsabilités après les violences ayant marqué les manifestations du 10, 11 et 12 juillet 2020 qui ont causé des décès et des blessés ainsi que la destruction de biens publics et privés, à la création d’un Comité de suivi de toutes les mesures et à la mise en place d’un régime de sanctions contre ceux qui poseront des actes contraires au processus de normalisation de la crise sociopolitique.

Dans un communiqué publié aujourd’hui, le Mouvement du 5 juin-Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP) affirme que « les décisions du sommet des chefs d’État de la Cedeao reposent sur des approximations très improbables ».

Le mouvement contestataire considère que les présidents ouest-africains, à l’instar de la mission de médiation conduite la semaine passée par l’ex-président du Nigeria, Goodluck Jonathan, « continuent de ramener la crise sociopolitique au Mali à un simple contentieux électoral du deuxième tour du scrutin législatif ».

Car, selon le M5-RFP, les conclusions du sommet des chefs d’État ne tiennent pas compte de la profondeur et de la gravité de la crise sociopolitique qui hypothèque l’avenir du Mali, ne correspondent aucunement aux attentes et aspirations du peuple malien et surtout violent les lois et la Constitution du Mali.

Le collectif opposé au président IBK fait remarquer que « des insinuations tentent de diluer les revendications populaires républicaines en brandissant l’épouvantail terroriste-islamiste et divertir le peuple malien qui a, depuis des siècles, opté pour la tolérance religieuse, l’islam choisi et la laïcité ». 

Accusant le chef de l’État malien d’avoir tenu ses propos durant la rencontre virtuelle avec ses homologues ouest-africains, le M5-RFP en déduit qu’ils relèvent « d’une tentative désespérée de noyer sa propre incapacité à juguler une lancinante crise multidimensionnelle qu’il a lui-même fortement aggravée ».

Leader des contestataires, l’imam Mahmoud Dicko et les autres chefs du mouvement réaffirment « leur détermination à mener (ce) combat pour sauver le Mali menacé de disparition en tant qu’État, Nation, Démocratie et République laïque, exigent plus que jamais la démission d’Ibrahim Boubacar Keïta et de son régime qui portent l’entière responsabilité de cette sinistre perspective pour notre pays ».

Enfin, le M5-RFP réitère son exigence d’actions judiciaires y compris devant la Cour Pénale Internationale (CPI) contre les auteurs, commanditaires et complices des tueries et exactions commises contre les manifestants par les Forces spéciales antiterroristes (Forsat), tant à Sikasso qu’à Bamako, dans les rues, domiciles et lieux de culte, et demande de libération de Soumaïla Cissé, chef de file de l’opposition enlevé en pleine campagne électorale par des groupes présumés jihadistes. 

Dans la foulée du sommet extraordinaire de la Cedeao, le président IBK a signé hier soir un décret de nomination de six ministres. Il s’agit du Général de Division Ibrahima Dahirou Dembélé, ministre de la Défense et des Anciens combattants, de Boubacar Alpha Bah, ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, du Général de Division M’Bemba Moussa Keïta, ministre de la Sécurité et de la Protection civile, de Kassoum Tapo, ministre de la Justice et des droits de l’Homme, de Tiébilé Dramé, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, et d’Abdoulaye Daffé, ministre de l’Économie et des Finances.

Mali : formation d’un gouvernement restreint

Le chef de l’État malien, Ibrahim Boubacar Keïta, a signé ce lundi soir le décret de nomination de six ministres.Conformément aux recommandations du sommet extraordinaire de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) tenu aujourd’hui par visioconférence, le président IBK a nommé six ministres qui vont s’occuper des affaires courantes du pays en attendant la mise en place d’un gouvernement d’union nationale.

Le Général de Division, Ibrahima Dahirou Dembélé occupe le poste de ministre de la Défense et des Anciens combattants. Le département de l’Administration territoriale et de la Décentralisation a été confié à Boubacar Alpha Bah. Le Général de Division, M’Bemba Moussa Keïta aura en charge la Sécurité et la Protection civile.

Kassoum Tapo est le ministre de la Justice et des droits de l’Homme tandis que Tiébilé Dramé gère les Affaires étrangères et la Coopération internationale. Enfin, Abdoulaye Daffé est aux commandes du ministère de l’Économie et des Finances.

Cette nouvelle équipe, dirigée par le Premier ministre Boubou Cissé, a pour principale mission de négocier la formation d’un gouvernement d’union nationale, précise la Présidence de la République du Mali.

Mali : la Cedeao propose un plan de sortie de crise

Le sommet extraordinaire de la Cedeao a abouti à un plan de sortie de crise devant être mis en oeuvre au plus tard le 31 juillet prochain.Le temps presse. Quatre jours seulement après la mission de médiation à Bamako de cinq chefs d’État de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), les présidents de l’espace communautaire ouest-africain se sont réunis en visioconférence ce lundi 27 juillet pour échanger sur la situation sociopolitique au Mali.

Au terme de cette rencontre virtuelle, les présidents de la Cedeao ont convenu de l’application de six mesures pour définitivement tourner la page de cette crise qui secoue le Mali depuis quelques mois.

Dans l’immédiat, il s’agit de la démission des 31 députés dont l’élection est contestée y compris le président de l’Assemblée nationale. À cet effet, la Cedeao recommande que la majorité présidentielle mette tout en œuvre pour obtenir cette démission qui ouvrira la voie à des élections partielles.

Mais en attendant la fin de ce processus, le parlement pourra fonctionner avec les 116 députés restants.

La Cour constitutionnelle, récemment dissoute par le président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), devra être rapidement recomposée conformément aux dispositions de la Constitution malienne. Concrètement, le parlement va proposer ses représentants après la démission des 31 membres dont l’élection est contestée.

Toutefois, en cas de difficulté de nomination des membres de la Cour Constitutionnelle par les différentes instances, le sommet extraordinaire de la Cedeao prône l’utilisation, par le Chef de l’État malien, de l’article 50 de la Constitution pour nommer les 9 membres.

Les présidents de l’Afrique de l’Ouest plaident aussi pour « la mise en place rapide d’un gouvernement d’union nationale avec la participation de l’opposition et de la société civile ».

Pour que le nouvel attelage gouvernemental réponde aux aspirations de tous les Maliens, la Cedeao encourage « l’opposition, particulièrement le M5-RFP, à participer à ce gouvernement d’union nationale en vue de contribuer au règlement des problèmes de gouvernance qui affectent le Mali et ce dans un esprit de patriotisme ».

En priorité, il incombe à ce nouveau gouvernement d’exécuter toutes les réformes, recommandations et décisions issues du Dialogue National Inclusif et de traiter les questions de gouvernance. Pour l’organisation régionale, la mise en œuvre de l’accord de paix, signé en 2015 entre le gouvernement et les groupes armés issus de la rébellion qui a éclaté dans le nord du pays en 2012, connu sous le nom de « l’accord d’Alger », devra être accélérée.

La Cedeao accepte, pour la gestion des affaires courantes, que certains membres du gouvernement d’union nationale soient nommés avant la formation de celui-ci. Ce sont les ministères en charge de la Défense, de la Justice, des Affaires étrangères, de la Sécurité intérieure et des Finances.

Visant la démission du président IBK, le Mouvement du 5 juin – Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP) a tenu des rassemblements dans la capitale malienne. Les 10, 11 et 12 juillet 2020, des violences ont causé des décès et des blessés ainsi que la destruction de biens publics et privés. Expressément, suggèrent les présidents ouest-africains, une commission d’enquête doit voir le jour afin de situer les responsabilités.

Pour s’assurer du respect de ce plan de sortie de crise, la Cedeao souhaite que soit créé un Comité de suivi de toutes les mesures. Au sein de cette structure, devront siéger des représentants du gouvernement, du parlement, de la société civile, de la magistrature, du M5-RFP, des femmes et des jeunes, avec la participation de l’Union Africaine (UA) et des Nations Unies, sous la présidence de la Cedeao.

Enfin, la Cedeao espérerant que ces différentes propositions rencontrent l’agrément des parties prenantes, compte appliquer « un régime de sanctions contre ceux qui poseront des actes contraires au processus de normalisation de cette crise ».

Dans son discours de clôture, Mahamadou Issoufou, chef de l’État nigérien et président en exercice de la Cedeao, a soutenu qu’en tout état de cause, « la Cedeao sera toujours présente aux côtés du Mali, acteur important des dynamiques communautaires en cours pour l’approfondissement de l’intégration de notre sous-région ouest africaine ».

Les présidents Macky Sall (Sénégal), Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire), Mahamadou Issoufou (Niger), Nana Akufo-Addo (Ghana) et Muhammadu Buhari (Nigeria) s’étaient rendus jeudi dernier à Bamako pour trouver une issue à la crise sociopolitique. Ce jour-là, leur médiation avait échoué malgré les longs entretiens avec les protagonistes.

Mali : les chefs d’Etat de la CEDEAO recommandent la mise en place d’un gouvernement d’union

Les chefs d’Etat et de gouvernement de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) ont tenu lundi par visioconférence un sommet extraordinaire à l’issue duquel ils ont recommandé la mise en place d’un gouvernement d’union nationale au Mali avec la participation de l’opposition et de la société civile.L’information a été donnée par Mahamadou Issoufou, le président nigérien, par ailleurs président en exercice de cette institution qui rapportait le communiqué final de cette rencontre extraordinaire sur la situation sociopolitique au Mali.

 Plusieurs autres recommandations ont été faites par les chefs d’État à cette occasion. Il s’agit entre autres, de la mise en place d’une commission d’enquête pour situer les responsabilités dans les violences qui ont entrainé des décès, des blessés et des dégâts dans ce pays les 10,11 et 12 juillet derniers.

La recomposition de la Cour constitutionnelle, la démission immédiate des 31 députés dont l’élection est contestée et la mise en place d’un régime de sanction contre ceux qui poseront des actes contraires au règlement de cette crise politique, figurent également sur la liste des recommandations.

Poursuivant, le président nigérien  a dit l’engagement des chefs d’État de la CEDEAO à promouvoir la paix et la stabilité au Mali.

« La CEDEAO sera toujours présente aux côtés du Mali», a assuré M. Issoufou précisant que les décisions de ce sommet devraient être mises en oeuvre au plus tard le 31 juillet prochain.

Le Mali est confronté depuis plusieurs mois à une violente crise politique où les adversaires du  pouvoir réclament de plus en plus la démission du président Ibrahim Boubacar Kéïta dit IBK.

Crise malienne: «le sort d’une partie de l’Afrique de l’Ouest se joue» (analyste)

Ibrahim Maïga, chercheur à l’Institut d’études de sécurité (ISS), décrypte la situation sociopolitique au Mali après la tentative de médiation de cinq chefs d’État ouest-africains.Pourquoi cette visite ?

L’objectif principal était d’aboutir à une issue consensuelle de sortie de crise pour éviter au Mali le scénario d’un vide constitutionnel avec des conséquences dramatiques pour toute l’Afrique de l’Ouest. Mais il faut rappeler que cette visite de cinq présidents ouest-africains (la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Niger, le Nigeria et le Sénégal) s’inscrivait dans le prolongement de la mission menée une semaine plus tôt par l’ancien président nigérian, Goodluck Jonathan, qui n’avait pas permis de trouver une solution à la crise politique qui secoue le Mali depuis le 5 juin 2020. Celle-ci avait formulé un certain nombre de recommandations dont la recomposition de la Cour constitutionnelle, la résolution du litige concernant les 31 sièges contestés à l’Assemblée nationale et la répartition du pouvoir à travers la formation d’un gouvernement d’union nationale sur la base de pourcentages établis. Ces propositions ont été rejetées par le M5-RFP, qui les juge contraires à la Constitution malienne et reproche à l’organisation sous-régionale un parti pris en faveur du président Ibrahim Boubacar Keïta. Néanmoins, étant donné la tension palpable dans le pays et au regard de l’échec des multiples tentatives internes de médiation, l’intervention de la Cedeao apparait comme nécessaire. Et bien qu’un consensus entre les différents protagonistes n’ait pas encore été trouvé, les missions successives ont permis de contribuer à faire baisser la tension dans la capitale malienne.

Que faut-il attendre du sommet extraordinaire ?

Les chefs d’État qui ont fait le déplacement à Bamako, jeudi dernier, ont insisté à de nombreuses reprises sur ce qu’ils considèrent comme étant la ligne rouge : la démission du président Keïta. En dehors de ce point, tout semble discutable dans le cadre des négociations entre la Cedeao et le M5-RFP. Les évènements qui ont eu lieu le week-end du 10 juillet et les pertes en vies humaines (11 morts selon un bilan officiel) ont radicalisé le mouvement de contestation. Il sera donc extrêmement difficile de tourner la page sans faire la lumière sur les circonstances dans lesquelles ces individus ont perdu la vie et sans situer les responsabilités. Cependant, la situation n’est pas totalement irréversible. Les prochains jours risquent d’être décisifs pour obtenir des concessions importantes. La Cedeao pourrait par exemple obtenir du président Keïta la démission de son Premier ministre et la nomination d’un nouveau aux pouvoirs élargis en accord avec le M5-RFP. Il faut aussi que la recherche de solutions prenne en compte le besoin d’amélioration du quotidien des Maliennes et des Maliens, ainsi que la nécessité d’instaurer un nouveau contrat social. La Cedeao peut encore formuler des recommandations qui permettent de poser les bases d’un processus politique fondé sur une feuille de route qui rendrait irréversible la mise en œuvre de profondes et indispensables réformes de gouvernance pour éviter au Mali et à la région un nouvel épisode d’incertitudes.

En cas d’échec, quels sont les risques pour la situation politique actuelle ?

Les évènements de ces dernières semaines à Bamako ont fait perdre de vue la situation extrêmement préoccupante du reste du pays, notamment dans le centre et le nord où les massacres des populations civiles et les attaques contre les forces de défense continuent d’être perpétrés. Tous les voyants semblent être au rouge et une instabilité politique prolongée à Bamako risque d’entrainer le pays dans une situation hors de contrôle. Il faut que les acteurs acceptent de négocier ce tournant qui fera date dans l’histoire du pays peu importe l’issue. Ce n’est pas uniquement le sort du Mali qui se joue mais aussi celui d’une partie de l’Afrique de l’Ouest.

Mali : statu quo dans le règlement de la crise sociopolitique

La médiation des cinq chefs d’Etat de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) achoppe sur le maintien d’Ibrahima Boubacar Keïta au pouvoir.A l’évidence, le désaccord entre le président malien et le Mouvement du 5 juin – Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP) est abyssal. La mission de haut niveau, menée par les présidents Macky Sall (Sénégal), Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire), Mahamadou Issoufou (Niger), Nana Akufo-Addo (Ghana) et Muhammadu Buhari (Nigeria), s’en est rendue compte ce jeudi à Bamako. Car elle n’a pu pousser les différentes parties à trouver un terrain d’entente au terme d’une longue journée de pourparlers.

Malgré cet échec faisant écho à celui de la mission de médiation de la Cedeao conduite par l’ancien président du Nigeria, Goodluck Jonathan, la sous-région n’abandonne pas le Mali à son sort puisqu’elle va tenir,  le 27 juillet prochain, un Sommet extraordinaire par visioconférence.

« J’espère qu’à l’issue de ce sommet des décisions fortes vont être prises par la Cedeao pour apporter une contribution à la mise en place d’une solution de sortie de crise », a déclaré le Nigérien Mahamadou Issoufou, par ailleurs président en exercice de la Cedeao.

Sans fard, il a indiqué que « le départ du président IBK est une ligne rouge pour la Cedeao régie par un protocole sur la démocratie et la bonne gouvernance (qui) prévoit qu’il n’y a pas de changement anticonstitutionnel du pouvoir ».

Si un accord n’a pas été entériné aujourd’hui, c’est parce que le M5-RFP, selon l’influent imam Mahmoud Dicko, a refusé qu’on lui « impose des solutions ». Les farouches membres de cette structure inédite ne veulent pas imaginer l’avenir de leur pays avec Ibrahima Boubacar Keïta à sa tête. 

Fragilisé par la contestation, le chef de l’Etat malien s’est laconiquement félicité, sur le compte Twitter de la Présidence de la République, « de la forte implication de l’organisation sous-régionale et de sa qualitative contribution au règlement de la crise sociopolitique ».

Au cours des dernières années, le leadership d’IBK s’est effrité à cause notamment de la crise sécuritaire dans le nord ou encore de heurts ethniques au centre. Mais les dernières élections législatives, tenues en mars et avril 2020, sont la goutte d’eau ayant fait déborder le vase. La Cour constitutionnelle est accusée par l’opposition d’avoir agi en faveur de 31 députés de la mouvance présidentielle.

Acculé, le président malien s’est résolu à dissoudre cette haute juridiction avant de demander la désignation d’autres membres par les autorités compétentes pour que « la Cour constitutionnelle reconstituée aide à trouver des solutions au contentieux (électoral) ».

Par la suite, la Mission de médiation de la Cedeao dirigée par Goodluck Jonathan a recommandé que « la Présidence de la République et le Conseil Supérieur de la Magistrature nomment chacun trois membres ». Cela permettrait à la Cour Constitutionnelle de réexaminer les résultats des élections législatives. 

Après la résolution du contentieux électoral, I’Assemblée nationale pourra, sur une base consensuelle, nommer ses trois membres pour compléter la formation de la nouvelle Cour Constitutionnelle.

La Cedeao avait également proposé la mise sur pied d’un gouvernement d’union nationale avec 50 % des membres provenant de la coalition au pouvoir, 30 % de l’opposition et 20 % de la société civile.

Tout compte fait, le chemin pour y arriver risque d’être long à moins que les différentes parties accordent enfin leurs violons.