Tchad : un référendum en vue pour trancher la question de la forme de l’État

A l’issue de son investiture le 11 octobre, Mahamat Idriss Deby, président de transition a rappelé l’urgence de tenir au plus vite le référendum constitutionnel sur la forme de l’état.

La question de la forme de l’Etat ne cesse d’alimenter les débats au Tchad. Après 45 jours de travaux, le dialogue national inclusif et souverain n’a pu apporter une réponse définitive.  C’est ainsi qu’en marge de sa prestation de serment pour assurer la deuxième partie de la transition  Mahamat Idriss Deby déclare : « Je rappelle l’urgence absolue de tenir au plus vite le référendum constitutionnel qui devrait trancher la question de la forme de l’État. »

Il assure que la deuxième phase de transition sera pleinement consacrée à la mise en œuvre des conclusions du Dialogue National Inclusif et Souverain. Le président de transition ajoute : « les recommandations de nos assises nationales sont l’unique bréviaire qui va commander toutes nos actions et particulièrement les miennes, dicter toute ma conduite et focaliser toute mon attention, durant la transition. »

Il est à rappeler que la question de la forme de l’Etat alimente les débats depuis plusieurs années. Tant dis que les uns souhaitent un Etat unitaire fortement décentralisé, d’autres tiennent fermement au fédéralisme. Le référendum à organiser permettra de trancher ce problème.

Tchad : Abdel-Nasser Garboa plaide pour un état unitaire décentralisé

Le directeur de cabinet adjoint de la présidence de la république, Abdel-Nasser Garboa, plaide pour état unitaire décentralisé d’une part et à un partage équitable des fonctions à tous les niveaux.

Lire la tribune

« La question de la forme de l’Etat est une question de tradition juridique. La tradition juridique tchadienne, héritée de la 5ème république Française, ne se prête qu’à une seule forme qui est l’Etat unitaire. Cet État peut être déconcentré ou décentralisé (je ne sais pas à quoi se rapporte le « fortement »utilisé à tout vent). Malheureusement, depuis l’institution de la forme décentralisée, elle n’a jamais été mise en application. Bien entendu, les élections partielles des élus locaux qui sont majoritairement analphabètes et incompétents notoirement, n’ont pas aidé et l’Etat n’a pas du tout procédé aux transferts des compétences et des ressources tels que prescrits par les différents textes organiques. En outre, les nominations des agents analphabètes, incompétents et surtout ignorants totalement les mœurs locaux et qui se comportent en conquérant plus qu’en administrateurs qu’ils n’auraient jamais dû l’être ont exacerbé les crises latentes entre communautés. Ces crises ne sont ni nouvelles ni spécifiques à une région ou une zone donnée du pays. C’est plutôt leur gestion ou plutôt leur absence de gestion efficiente qui est la nouveauté aujourd’hui. Les chefs traditionnels dépouillés de leur rôle d’antan, les éleveurs armés lourdement par la complicité des certains responsables administrativo-sécuritaires et aussi par leur extrême mobilité qui leur permet de s’approvisionner en arme dans les pays voisins avec lesquels nos frontières sont extrêmement poreuses, ont fini par rendre cette situation hors de contrôles. Pire, les méthodes employées dans le Darfour voisin semblent être aujourd’hui expérimentées au Tchad. De même, les nouvelles technologies avec leurs corollaires de smartphone et de réseaux sociaux d’une part et d’autres part l’extrême mobilité des protagonistes qui utilisent les motos ont accentué la pression communicationnelle et opérationnelle sur les FDS qui n’arrivent pas à suivre le rythme et sont souvent pris de court par les déroulements des conflits. Face à tout cela, les gens sont arrivés au bout de leur patience.

Dans nos villes, les jeunes des extractions modestes ont perdu l’espoir. D’un côté, ils voient leurs amis qui étaient dernier de la classe évolués comme des météorites dans l’administration en s’octroyant des postes les plus juteux et en se construisant des immeubles cousus et s’offrant les plus belles voitures et de l’autre, ils éprouvent du mal à se faire ne serait-ce qu’une petite place dans l’administration. Les inégalités entre les citoyens sont reflétés dans les différents actes administratifs de nominations et cela a provoqué aujourd’hui l’ouverture d’un autre front au centre du pays avec les voix qui se lèvent pour dire que dans cette lutte de pouvoir entre le Nord et le sud, c’est le centre qui en paie le prix fort. Pour les tenants de ce discours, le centre est composé du Batha, du Guéra, du Salamat et du Chari-Baguirmi. Selon eux, les ressortissants de ces provinces doivent avoir une participation active dans le partage des responsabilités post DNIS.

En effet, tout cela doit avoir pour socle un contrat social solide et une gouvernance irréprochable. Aujourd’hui, dans toutes les régions du Tchad, on peut trouver des cadres compétents avec une formation solide pour occuper n’importe quel poste de responsabilité. Il appartient donc aux pouvoirs publics de mettre un terme d’une manière résolue à l’inégalité et aussi à l’iniquité.

Malheureusement, tant que nous ne prenons pas nos responsabilités historiques pour mettre de l’ordre dans notre gouvernance, rien ne pourra nous aider à améliorer. Le fédéralisme tant chanté n’accouchera que des chimères parce que ces tensions ne seront qu’exacerbées et les Gouverneurs sans armées ne pourront rien puisqu’ils ne peuvent pas interdire aux tchadiens de s’établir où ils veulent malgré la fédération. De même, un état fédéré ne peut à lui seul, sans le concours de l’état central, endiguer ce fléau. Le Nigeria qui est un État fédéral fait face à toutes les crises que nous décrions ici. Des conflits éleveurs agriculteurs sont récurrents et très mortels dans les régions à forte populations agricole et éleveur comme l’Adamaoua, la Gombe ou le Yobé.

Je plaide donc pour un état unitaire décentralisé d’une part et à un partage équitable des fonctions à tous les niveaux et un accès aux concours et recrutement dans l’équité à toutes les régions du pays. Et cela, nous pouvons le faire. La plénière doit prendre des résolutions fortes avec des garanties réelles pour la mise en application des décisions. »

Tchad : le débat sur la forme de l’Etat abordé par les mouvements armés à Doha

D’après le Comité d’organisation du dialogue national inclusif (CODNI) , les travaux de restitution des cinq rapports des différents groupes thématiques ont pris fin.

Commencés le mardi 29 mars 2022, les différents groupes thématiques se sont succédé pour la présentation de leurs rapports aux membres du CODNI. Après la restitution des quatre premiers rapports, le premier et deuxième jour, la journée du 31 mars était consacrée à l’analyse du rapport du groupe thématique N° 2. Ce groupe a travaillé sur le thème « Refonder l’Etat, restaurer et renforcer la Démocratie ». Ainsi ils ont passé en revue la forme de l’Etat, la Constitution, la Reforme institutionnelles et le processus électoral.

Lire : Tchad : pré-dialogue de Doha, les exigences des politico-militaires sont connus

Au cours des deux premières plénières, les membres du CODNI ont eu droit à la présentation du sous-comité thématique n°1 qui a travaillé sur le thème « Quel dialogue pour le Tchad ?» avec en ligne de mire la question relative à la paix, la cohésion sociale et la réconciliation nationale.

Ensuite, le sous-comité thématique n°4 a présenté son rapport final portant sur « les sous-thèmes des politiques publiques sectorielles. » Le rapport du groupe thématique n° 5 qui porte sur les questions liées à l’éthique, aux comportements et aux valeurs a été également analysé et discuté lors des deux premières journées.

Il est précisé que, l’analyse de ces différents rapport ont a été fait sous la président du Comité d’organisation du dialogue national inclusif Acheikh Ibn Oumar.*

Lire aussi : Tchad : les rebelles du CCMSR se retirent du pré-dialogue de Doha