Au Tchad, le gouvernement accuse l’Église de semer la division

Jeudi 19 avril, les évêques tchadiens ont appelé à l’organisation d’un référendum pour le vote de la nouvelle Constitution. Le gouvernement s’est dit « stupéfait » et « indigné » de cette intervention de l’Église catholique.

« Nous exprimons notre stupéfaction et notre indignation face à cette déclaration infondée, qui non seulement fait une lecture complètement erronée de la Constitution en vigueur, mais jette les germes d’une grave division des Tchadiens », a déclaré, samedi 21 avril, Mariam Mahamat Nour, secrétaire générale du gouvernement tchadien, chargée des relations avec le Parlement.

Cette responsable gouvernementale répondait aux évêques tchadiens qui ont appelé, jeudi 19 avril, à l’organisation d’un référendum pour l’adoption de la nouvelle Constitution tchadienne. « Le président tchadien, Idriss Déby Itno, est le seul habilité à décider de la tenue d’un référendum », a-t-elle rappelé.

Le texte de la nouvelle Constitution tchadienne, très controversé, est issu des résolutions d’un forum sur les réformes institutionnelles qui a réuni les forces politiques, religieuses et sociales du Tchad en mars, mais qui a été boudé par l’opposition.

Le vote pour l’adoption du nouveau texte constitutionnel est prévu à l’Assemblée nationale le 30 avril. La nouvelle Constitution, si elle est adoptée, instaurera un régime présidentiel qui renforcerait les pouvoirs du président Idriss Déby Itno et introduirait une quatrième République.

Idriss Déby, 65 ans, au pouvoir depuis 1990, en est à son cinquième mandat qui doit s’achever le 21 août 2021. La nouvelle constitution lui permettrait de se représenter en 2021 et d’effectuer deux autres mandats de six ans. Il pourrait donc être président jusqu’en 2033.

Les évêques tchadiens estiment qu’une adoption du texte constitutionnel par voie parlementaire « risque de fausser gravement les règles du jeu démocratique ». L’Assemblée nationale tchadienne est, en effet composée d’une forte majorité de députés proches du pouvoir. L’épiscopat tchadien estime, en outre, qu’« une grande partie de la population tchadienne ignore complètement ce qui se passe ».

Inquiétude de l’opposition et de la société civile

Le vote prochain de ce projet de loi provoque des fortes tensions entre le pouvoir, les partis d’opposition et la société civile.

Mardi 17 avril, sept associations de la société civile tchadienne ont demandé, dans une lettre ouverte aux députés, de ne pas voter la nouvelle Constitution, estimant que « la constitution encore en vigueur dit qu’une telle révision passe par un référendum ».

Lundi 16 avril, les 33 députés de l’opposition (sur les 170 que compte le parlement tchadien) ont annoncé leur boycott des travaux parlementaires sur l’adoption du texte. « Nous connaissons très bien la machine infernale qui a été lancée contre nous et contre la population tchadienne, a confié à RFI le chef de file de l’opposition, Saleh Kebzabo qui rejette la nouvelle Constitution. Déby veut les pleins pouvoirs. Il ne se satisfait pas de ce qu’il a obtenu jusqu’ici. Il a une majorité écrasante à l’Assemblée nationale, il fera ce qu’il voudra. »