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Monseigneur Bani : « L’agriculture est le domaine qui fournit le plus d’emplois dans notre pays »

Monseigneur Bani, l'évêque de Doba, au Tchad, revient sur la place des jeunes dans la société, l'agriculture et évidemment la…

Monseigneur Bani, l’évêque de Doba, au Tchad, revient sur la place des jeunes dans la société, l’agriculture et évidemment la place de l’Eglise au Tchad.

Doba est le chef-lieu de la région du Logone Oriental, dans l’extrême sud du Tchad, et c’est une région d’exploitation pétrolière. Qu’est-ce que l’ouverture des puits de pétrole en 2003 a changé à Doba et dans sa région?

Evidemment il y a eu des investissements pour la région, il y a quelques années. Pour construire des écoles, même si ces écoles ne sont pas destinées à rester. Et puis dans le domaine de l’eau et de la santé. Mais depuis quelque temps, il y en a moins, à cause de la crise du pétrole. Mais l’impact le plus négatif est aussi l’inquiétude par rapport à l’environnement. Et surtout par rapport aux gens qui vivent sur ce territoire où on exploite le pétrole, où beaucoup ont perdu leurs terres. Ils ont été dédommagés mais comme les gens n’étaient pas préparés à la gestion de l’argent, ils sont retombés dans la pauvreté et ont eu ensuite des difficultés pour retrouver des terres et y travailler.

Coopération avec l’Allemagne

De quoi est-ce que vous vous êtes entretenu avec les députés du Bundestag, les députés allemands, que vous avez rencontrés à Berlin?

C’était dans le cadre d’un échange, pour parler de problèmes en lien avec l’accaparement des terres dans notre pays. L’agriculture est le domaine qui fournit le plus d’emplois dans notre pays, mais beaucoup de jeunes ne trouvent pas de terre et c’est difficile pour eux.

Que peut faire l’Allemagne pour inciter les autorités tchadiennes à modifier le droit foncier?

Peut-être à travers l’ambassade ou dans le cadre de la coopération peut-on réfléchir sur la politique foncière dans le sud, comme ça avait été fait dans la déclaration du G7 par exemple. Au moins pour faire connaître un peu la situation.

Rôle de l’Eglise dans le pays

Vous parlez d’impartialité de la justice, de lutte contre l’impunité, de problèmes d’accaparement des terres… Pourtant, on a l’impression qu’on entend un petit peu moins l’Eglise catholique tchadienne intervenir dans les questions politiques du Tchad que celle de RDC par exemple, ou de Centrafrique.

La situation au Congo est tout à fait différente. L’Eglise catholique y est majoritaire et elle a sa manière de réagir. Ça ne signifie pas qu’on n’a pas d’intérêt pour les problèmes que vit la population. On en parle quand on a la possibilité de rencontrer le président, les méthodes sont peut-être différentes, mais on en parle, nous faisons quelque chose.

Scandales sexuels

Comment est-ce qu’on discute au sein de l’Eglise tchadienne des scandales qui ont entaché ces dernières années l’Eglise catholique. Je pense notamment bien sûr aux affaires de prêtres pédophiles mais aussi aux difficultés que rencontre le pape François à réformer l’institution de l’Eglise catholique romaine. Souvent l’Eglise en Afrique est réputée être un peu plus conservatrice. Comment est-ce que ça se passe au Tchad?

L’Église est réputée être conservatrice ? Ça, je ne peux pas l’affirmer. Les orientations que l’Église donne actuellement par la voix du pape François, dans le domaine de la lutte contre les abus sexuels, nous les partageons tout-à-fait. C’est important pour la crédibilité de l’Église. D’autant que ça touche aussi à ce qui est particulièrement important : les vocations. Nous partageons tout à fait cette préoccupation et nous faisons de notre mieux pour sortir un document qui puisse aider les uns et les autres dans le sens de la transparence et de la conversion dans les rapports, dans les relations avec les personnes.